Résumé : A partir du postulat que les comportements problématiques que manifestent certains adolescents ayant grandi dans les villages d’enfants SOS au Rwanda post-génocide constituaient le versant négatif de l’aboutissement du processus de construction du sentiment d’exister, l’objectif principal de cette recherche était la compréhension de ce processus. Ces comportements problématiques ne seraient pas nécessairement synonyme de son échec, mais seraient, surtout à l’adolescence, des tentatives de se faire exister, en lien avec différents éléments qu’il nous fallait découvrir.En appliquant une approche développementale et systémique de recherche et en raisonnant en termes de facteurs de protection et/ou de risque, nous avons identifié quatre facteurs impliqués dans ce processus.Le traumatisme psychique et les deuils compliqués qui ont succédé aux différentes pertes que ces adolescents ont subies pendant le génocide continuent de peser sur le processus de construction de leur sentiment d’exister. De ce fait, certains des comportements problématiques qu’ils affichent peuvent se comprendre comme des réactions comorbides au PTSD.L’environnement physique/matériel et humain dans lequel ces adolescents ont grandi était aussi un facteur de risque. La discontinuité/pluralité des contextes dans lesquels ils ont vécu, le côté institutionnel des villages d’enfants qui prend le dessus sur le côté familial, la primauté des liens de sang dans la société rwandaise et la (trop) grande importance accordée aux activités scolaires au détriment des autres activités sont mis en cause.La qualité de l’attachement développée par chacun des jeunes suivant sa trajectoire de développement joue aussi dans certains cas comme facteur de risque. L’insécurité de l’attachement est notamment impliquée dans certains comportements problématiques, dans la question de dépendance chronique de certains jeunes et dans la faible estime de soi.L’étude a aussi montré que dans certains cas ce sont les modalités relationnelles familiales et extrafamiliales propres à chaque adolescent qui jouent comme facteurs de risque, notamment des difficultés liées à la quête des origines et des héritages familiaux, ainsi que celles liées à la construction d’un sentiment d’affiliation à la famille SOS d’accueil.
From the assumption that problematic behaviors manifested by some adolescents who were raised in SOS Children’s Villages in post-genocide Rwanda constitute the negative side of the outcome of the process of construction of their sense of existence, the main aim of this research was to understand that process. These behavior problems would not necessarily mean its failure. Rather, especially at the adolescence period, they would be understood as attempts to make themselves exist, in line with different elements that we ought to discover.Applying a developmental and systemic research approach, and reasoning in terms of protection and/or risk factors, we identified four factors involved in that process.The psychological trauma and complicated grief that followed the losses that these adolescents sustained during the genocide are still a burden to the process of construction of their sense of existence. Therefore, some of their behavior problems can be understood as comorbid reactions to the PTSD.The physical and human environment in which these adolescents were raised was also a risk factor. The discontinuity/plurality of contexts in which they lived, the institutional side of SOS Children’s Villages that overpowers the family side, the primacy of blood relationships in the rwandan society and the (too much) consideration given to school activities, leaving out other activities, were found to be involved.The quality of the attachment developed by each youth through their development path comes also as a risk factor in some cases. The attachment insecurity is, among others, involved in some behavior problems, in the chronic dependency of some adolescents, and in the lack of self-esteem.The study also shows that in some cases, it is the family and extrafamily relational modalities of every adolescent that play as risk factors, namely those difficulties related to the quest for origins and family heritages and those involved in the construction of the feeling of belonging or affiliation to the SOS foster family.