Résumé : En commençant son étude critique sur Camus, Pierre de Boisdeffre,dans (Métamorphose de la littérature, Proust, Valéry, Cocteau, Anouilh, Camus, Sartre, Verviers, Marabout Université, 1974, p.309), fait le constat suivant:"l'Europe depuis Nietzsche, est à la recherche d'un cinquième Evangile. Qu'elle exalte les nourritures terrestres ou qu'elle communie à sa propre nausée, la littérature contemporaine n'a plus qu'une seule certitude: elle sait que Dieu est mort et s'efforce de le remplacer par l'Homme." En méditant la pensée de Camus à travers ses essais philosophiques, il semble que, même si dans un entretien sur la révolte, ce dernier déclare qu'"il n'est pas humaniste", la question du comment l'homme doit vivre avec ses semblables dans le monde et en société, est au centre de la réflexion philosophique camusienne. Car, l'époque de Camus fut celle où la vie humaine comme valeur et la dignité de l'être humain, furent soumises à une dure épreuve d'être respectées par chaque homme et en tout homme. D'où l'intérêt que l'oeuvre de Camus porte sur la question de la "vitalogie": L'homme peut-il vivre heureux sans le secours de Dieu? Oui ou non, l'homme, peut-il se tuer volontairement ou bien tuer les autres sans raison? L'homme peut-il détruire le monde qui le porte sans détruire sa propre vie? En effet, loin de voir dans la mort raisonnée et dans le suicide une valeur, Camus considère qu'ils sont plutôt un mal que les hommes doivent éviter et faire éviter les autres dans le "vivre-ensemble." C'est pour cette raison que la pensée philosophique chez Camus présente comme l'une des caractéristiques majeures, la "passion de vivre" de l'homme et pour l'homme, car la vie est, selon lui, une valeur cardinale qui doit être respectée en tout être humain dans la communauté qui voudrait être juste, paisible, libre, solidaire et unie. A cet effet, nous soutenons la thèse suivante: La pensée camusienne est une "vitalogie" paradoxale, c'est-à-dire qu'elle est debat philosophique sur la vie de l'être humain, en tant que valeur fondamentale, dans ses rapports avec Dieu, le monde et les autres. Par conséquent, une société dans laquelle les hommes sont habités par la passion de bien vivre et mieux vivre ensemble, il y a une exigence impérieuse pour eux de promouvoir et de crer les valeurs qui favorisent le respect de l'être humain et de sa vie. La vitaogie camuusienne est indissociable de la vision qu'on se fait sur l'homme ici et maintenant, en tenant compte des contradictions ou des antinomies du "oui" et du "non" de l'existence. Selon Camus, en effet, la mission principale de l'homme dans le monde est de vivre: "Oui, mais je n'aurai rien manqué de ce qui fait toute ma mission et c'est de vivre." (Carnets I.,p.92). La pensée camusienne est donc une vitalogie. Mais comment l'homme doit-il vivre? Celui-ci, pense Camus, doit devenir "créateur" des valeurs de la justice, de la liberté, de la solidarité, de la paix, de l'amitié et de la fraternité entre les hommes et être courageux, pour assumer la responsabilité de sa vie et de son destin dans le monde, en évitant d'aliéner son esprit dans les illusions, dans quelque absolutisme qu'il soit ou dans un pessimisme tétanisant. Au total, l'homme doit prendre en main sa destinée, en vue de la "joie vivre", sans pour autant perdre de vue que celle-ci ne se sépare pas non plus du "désespoir de vivre."