Résumé : Cette recherche porte sur l’acquisition et la construction de la notion de temps chez les enfants de 5 à 9 ans, c’est-à-dire ceux qui fréquentent des classes allant de la 3e maternelle à la 3e année primaire. Dans la partie théorique nous analysons les différentes notions constitutives qui caractérisent le temps : l’ordre de succession, la durée, le cycle, l’irréversibilité, l’horizon temporel. Nous nous intéressons également aux notions linguistiques ainsi qu’aux notions associées telles que la causalité, les perspectives diachroniques, la vitesse et la notion d’âge. Nous investiguons ensuite l’état actuel des données concernant la connaissance de la notion de temps chez l’enfant en synthétisant les approches théoriques et expérimentales de Piaget (1946) sur le temps physique et les opérations logico-mathématiques, celle de Fraisse (1967) et Montangero (1988) sur les différents niveaux d’adaptation au temps, celles de Friedman (1991), Nelson (1996), Godard et Labelle (1998) et Tartas (2001) sur l’acquisition du temps conventionnel et la localisation dans le temps. Puisque nos questions de recherche concernent l’évolution de la notion de temps et puisqu’elles s’inscrivent dans le champ d’étude de la psychologie du développement (même s’il y a aussi des liens avec la psychologie cognitive, la linguistique et l’éducation), nous avons confronté les théories de différents développementalistes : Piaget, Vygotski, Wallon, Nelson et Karmiloff-Smith. Même si ces auteurs sont tous des cognitivistes et des constructivistes, leurs conceptions se différencient en ce qui concerne les facteurs étudiés, la définition du « concept », la conception du « moteur du développement », le rôle accordé à l’action, à « l’autre », au milieu ; le statut attribué au langage et à la médiation verbale dans la problématique « cognition-langage ». Afin de respecter une vision globale de l’enfant et de la notion de temps, la partie empirique porte à la fois sur le temps représenté et vécu. Nous avons étudié la maîtrise des systèmes de temps conventionnels, l’orientation et la localisation temporelles, la compréhension des relations temporelles, la notion d’ordre de succession et l’évaluation de durées. Nous nous sommes également penchée sur la définition et la représentation du concept, la notion d’âge, les représentations infantiles de la croissance et du vieillissement, l’attitude affective de l’enfant vis-à-vis son dynamisme évolutif et l’horizon temporel (passé, présent et futur). C’est en analysant les taux de réussite pour chacune des tâches dans un même cadre temporel (journée, jours de la semaine, semaine, mois de l’année, saisons, année, période de vie, vie entière) que nous pouvons dégager des « niveaux d’appropriation » des différentes unités temporelles ainsi que des « profils de compétence » qui différencient les enfants d’années scolaires différentes. Les résultats sont discutés du point de vue des facteurs qui interviennent dans la maîtrise des notions et concepts temporels. Nous étudions plus particulièrement l’impact et le rôle de trois facteurs : l’élargissement du champ conceptuel (« empan cognitif »), la possibilité d’associer les concepts temporels à des expériences vécues ou à des images mentales précises et la médiation verbale (en termes de liens entre langage et pensée).