Résumé : La Sécession dans l’architecture à Cracovie (1897-1914) Un costume national, moderne et européen

A la fin du XIXe et au début du XXe siècle, l’Art nouveau envahit la majeure partie de l’Europe. Dans chaque pays, ce mouvement artistique prit des appellations et des physionomies différentes. Mélangé souvent aux traditions locales, ce style international développa un langage original jusqu’à devenir parfois synonyme de style national, revêtant selon le cas un costume national, moderne et européen.

Dans ce contexte international et de promotion de l’identité nationale, le cas très particulier de la Pologne est révélateur, puisqu’elle avait disparue des cartes de l’Europe et était partagée entre trois puissances : la Prusse, la Russie et l’Autriche. Pourtant si l’Etat polonais n’existait plus, la nation n’a jamais cessé d’exister à travers la culture et la religion. A ce titre l’étude de l’architecture de Cracovie, - ancienne capitale de la Pologne, sous occupation austro-hongroise, en Galicie - est significative.

A Cracovie, le style sécessionniste - expression utilisée dans l’Empire austro-hongrois et repris pour l’ensemble de la Pologne - influença le développement de tous les arts. Cependant de nos jours, ces traces sont surtout visibles sur les façades des édifices. De ce fait, notre analyse s’est limitée aux différents costumes sécessionnistes décoratifs dans l’architecture de Cracovie, pendant la période de la Sécession, c’est-à-dire de 1897 à 1914, dans huit quartiers, les plus anciens de la ville.

Au tournant du siècle, Cracovie devint très vite le berceau du mouvement sécessionniste en Pologne, le centre de la modernité, une ville européenne novatrice dans tous les domaines artistiques. Lieu de naissance de la « Jeune Pologne », les premières innovations apparurent grâce à de nombreuses personnalités artistiques marquantes, d’abord en peinture, ensuite en littérature et dans les arts plastiques, enfin en architecture.

La Sécession a laissé une quantité impressionnante de traces dans l’architecture cracovienne, décorant les plus importants monuments de tous les quartiers, s’illustrant dans les immeubles à appartements privés et laissant derrière elle également quelques chefs-d’œuvre.

Le premier chapitre intitulé « La ville de Cracovie », brosse un aperçu du cadre général. Il vise à préciser dans ses grandes lignes le caractère spécifique de la tradition culturelle polonaise à Cracovie.

Le deuxième chapitre « La Sécession et la ville de Cracovie » intègre le rapport de la Sécession à l’intérieur de la ville et ce sous différents angles de vue. C’est doté de cet héritage que les écrivains, les artistes, les architectes et les constructeurs de la fin du siècle vécurent la crise qui remettait en question la fonction et le sens de leur activité par rapport à leur identité nationale. Leur dilemme est illustré par les plus grandes figures de la littérature et des arts plastiques. Nous avons pu mettre en évidence leur difficile tâche d’adaptation de cet héritage culturel, chacun à sa manière, aux problèmes liés aux nouvelles tendances modernes.

Le troisième chapitre intitulé « La Sécession dans l’architecture » constitue le cœur de notre thèse. Il est une analyse rétrospective du système sécessionniste dans l’architecture à Cracovie, accompagné d’un inventaire détaillé de la Sécession dans l’architecture de la ville. Il intègre ensuite ce thème dans le contexte national et le compare avec la situation dans d’autres métropoles européennes.

Le quatrième chapitre, « La Sécession dans les rues de la ville » donne de la perspective à notre inventaire en intégrant la Sécession dans le paysage urbain.

Le cinquième chapitre « L’Homme et la Sécession » s’intéresse à l’interaction entre l’homme et la Sécession et mettra en évidence les propriétaires, les commanditaires, les architectes et les constructeurs.

Enfin, le sixième chapitre intitulé « La Sécession et les juifs de Cracovie » met en relation l’apparition du nouveau style avec une partie de la population polonaise, les juifs de la ville.

De nos jours, il est difficile d’avoir une vue d’ensemble de l’intégration de la Sécession sur les territoires polonais sous occupation au tournant du XIXe et du XXe siècle et dans une plus large mesure en Europe. Il est cependant indéniable qu’elle fit sa première apparition à Cracovie et qu’elle y a marqué de son empreinte une quantité considérable de constructions, avant de s’étendre sur les territoires polonais sous occupation, et prétendre être le berceau de la Sécession en Pologne.

A la différence des autres pays européens, la Sécession cracovienne ne fut pas fondée sur des principes théoriques, sur un programme, résultant de l’évolution socio-historique du pays dont la situation était des plus complexes. En effet, elle a subi l’influence de différents courants européens, surtout de la Sécession viennoise, en revêtant différents costumes : national, moderne et européen.

Résultat de la convergence de facteurs culturels, politiques, économiques, sociaux, démographiques et esthétiques, Cracovie fin de siècle fut un lieu d’expérimentation et constitue encore aujourd’hui, le foyer vivant de cette dynamique culturelle et artistique née à la fin du XIXe siècle.

Si durant l’histoire, la Sécession dans l’architecture de Cracovie n’a pas toujours été appréciée à sa juste valeur, de nos jours un regain d’intérêt se fait sentir notamment par de nouvelles restaurations.

A présent, il est possible de cerner l’ampleur du phénomène sécessionniste à Cracovie. Une analyse de la présence du style dans tous les quartiers de la ville, ainsi que des constructions détruites, est nécessaire afin de mettre en évidence la véritable diffusion du nouveau style dans la ville au tournant du XIXe et du XXe siècle.

La présente thèse constitue un premier pas dans la compréhension du phénomène. Les résultats des travaux en cours au niveau européen permettront d’intégrer davantage la Sécession cracovienne dans un contexte international et de tisser des liens éventuels entre les différents foyers artistiques.