Résumé : Depuis leur découverte au milieu des années quatre-vingt, les noyaux à halo n'ont cessé d'intriguer et de fasciner. Cette découverte a été rendue possible par le développement de faisceaux d'ions radioactifs au cours des années septante. Cette performance a ouvert le champ de l'exploration des propriétés des noyaux atomiques aux frontières de la stabilité.

Les noyaux à halo présentent une taille beaucoup plus grande que prévue par l'hypothèse communément adoptée du noyau sphérique et seraient constitués d'un coeur, qui a les propriétés d'un noyau normal, auquel un ou deux neutrons qui forment le halo seraient faiblement liés. Cette propriété bouleverse complètement l'image traditionnelle du noyau atomique, celle d'un mélange quasiment homogène de protons et de neutrons.

Les noyaux à halo ont tendance à facilement se dissocier lorsqu'ils entrent en collision avec un noyau cible. Leurs réactions de dissociation constituent donc un formidable outil expérimental pour étudier leurs propriétés. Cependant l'analyse de telles réactions nécessite une description précise du processus de collision. A cette fin, nous avons développé un nouveau modèle de réaction: l'approximation eikonale dynamique. Il s'agit d'une méthode purement quantique qui combine les avantages des approximations eikonale traditionnelle et semi-classique. Elle prend en compte aussi bien les effets dynamiques du mouvement interne du projectile que les interférences quantiques entre les trajectoires. Elle conduit à la résolution d'une équation de Schrödinger approchée similaire à celle de l'approximation semi-classique avec trajectoires rectilignes.

Nous appliquons l'approximation eikonale dynamique à l'étude de réactions impliquant trois noyaux à halo différents : le $^{11}$Be, le $^{19}$C et le $^{8}$B. Pour les trois systèmes étudiés, nous confrontons nos résultats théoriques avec les données expérimentales disponibles. Nous constatons un très bon accord tant sur l'allure que sur l'ordre de grandeur des différentes sections efficaces. Ceci est valable aussi bien pour les collisions sur cible lourde que sur cible légère. Les motifs d'interférence présents dans les distributions angulaires sont également bien reproduits par notre modèle, y compris pour la diffusion élastique.

Nous analysons la section efficace de dissociation expérimentale du $^{19}$C dans le but de déterminer la présence d'une résonance dans le spectre continu de ce noyau. Nous constatons que plusieurs options restent plausibles et que d'autres mesures sont nécessaires (sur cible légère, par exemple) pour confirmer nos hypothèses.

La dissociation coulombienne du $^{8}$B fait l'objet de nombreuses études expérimentales dans le but d'obtenir des informations sur la réaction inverse qu'est la capture radiative $^{7}$Be(p,$gamma$)$^{8}$B. En analysant cinq expériences pour lesquelles différentes observables ont été mesurées, nous examinons la validité des hypothèses qui permettent de faire un lien direct entre dissociation et capture radiative. Nous observons que l'extraction d'informations sur la capture radiative à partir de données de dissociation semble plus compliqué qu'initiallement prévu. Cependant les différentes mesures permettent de valider un modèle de structure du $^{8}$B qui peut servir au calcul de la section efficace de capture radiative.

L'approximation eikonale dynamique constitue donc un outil performant qui permet d'analyser toutes les observables liées à la dissociation élastique d'un noyau à halo sur une cible lourde ou légère à des énergies incidentes de quelques dizaines de MeV par nucléon.