Résumé : Dans un premier temps, nous avons réalisé des revues systématiques de la littérature avec méta-analyses des données de survie. Ceci nous a conduits à sélectionner 4 marqueurs de mauvais pronostic pour la survie des CBNPC: le récepteur au facteur de croissance épidermique (EGF-R), un autre récepteur de cette famille (c-erbB-2) ainsi que deux autres facteurs potentiellement témoins de leur activité, Ki-67 (impliqué dans la prolifération) et le nombre des micro-vaisseaux (témoins de la néoangiogenèse).

Dans une deuxième phase, nous avons étudié au laboratoire diverses questions sur des tumeurs bronchiques invasives.

Premièrement, nous avons investigué le mécanisme de surexpression d’EGF-R et de c-erbB-2 et évalué si des anomalies génétiques pouvaient prédire cette surexpression, en recourant à des techniques d’immunohistochimie et de FISH. Ceci nous a permis d’observer que, si la majorité des CBNPC réséqués présentent des anomalies génétiques d’EGF-R et/ou de c-erbB-2, une amplification de ces gènes n’est présente que dans une minorité d’entre eux et n’est pas strictement corrélée à l’expression protéique. D’autre part, la survie de ces patients exprimant ou ayant une anomalie génique d’EGF-R et/ou c-erbB-2 est plus courte sans atteindre le seuil de signification statistique.

Deuxièmement, nous avons recherché sur des tumeurs opérées d’éventuels liens entre les expressions d’EGF-R, de c-erbB-2 et de Ki-67. Aucune corrélation n’a été mise en évidence entre l’expression de ces 3 facteurs. Par contre, chez ces patients, l’expression de Ki-67 dans la tumeur s’est avérée être un facteur de mauvais pronostic pour la survie.

Troisièmement, nous avons voulu savoir si un de ces marqueurs (EGF-R) présentait une valeur pronostique dans un groupe plus restreint de tumeurs plus avancées, les CBNPC de stade III. Pour mener cette recherche sur des biopsies, nous avons d’abord démontré que l’évaluation des marqueurs biologiques (EGF-R, c-erbB-2 et Ki-67) sur biopsie ne différait pas de celle réalisée sur des tumeurs réséquées. Comme les résultats étaient équivalents, nous avons pu étudier EGF-R sur les biopsies de CBNPC au stade III et montrer qu’EGF-R n’était pas un facteur pronostique pour la survie dans ce groupe assez homogène de tumeurs avancées.

Dans la dernière phase, nous avons étudié des lésions représentatives des différents stades prénéoplasiques et néoplasiques précoces radiooccultes. Ces lésions ont été prélevées lors d’examens endoscopiques de photodétection. EGF-R, c-erbB-2, Ki-67 et le nombre des micro-vaisseaux ont été étudiés par immunohistochimie dans ces différents stades de lésions prénéoplasiques et néoplasiques précoces. Nous avons observé qu’EGF-R et Ki-67 sont statistiquement plus exprimés dans les dysplasies sévères et les carcinomes in que dans les dysplasies légères suggérant que, au moins pour ces 2 marqueurs, les dysplasies sévères se rapprochent plus des carcinomes in situ que des dysplasies légères. Alors que l’expression d’EGF-R est présente dès le stade de dysplasie sévère, une augmentation du nombre des micro-vaisseaux n’est présente qu’au stade de tumeurs micro-invasives. C-erbB-2 n’est quant à lui pas exprimé dans ces lésions bronchiques prénéoplasiques et néoplasiques précoces.

En conclusion, les facteurs biologiques, EGF-R, c-erbB-2 et Ki-67 et le nombre des micro-vaisseaux s’avèrent des facteurs de mauvais pronostic dans le CBNPC. La surexpression d’EGF-R et de c-erbB-2 dans les cancers réséqués résulte très rarement d’une amplification génique et nous n’avons pas trouvé dans ces tumeurs de corrélation entre l’expression des marqueurs moléculaires étudiés. Dans les tumeurs plus avancées de stade III, EGF-R n’est pas un facteur discriminant pour le pronostic. Les anomalies de certains de ces marqueurs (EGF-R et Ki-67) apparaissent précocement, dès les stades prénéoplasiques, avec un seuil se situant entre les lésions bronchiques de bas et de haut grades. La néoangiogénèse, évaluée par le nombre des micro-vaisseaux, s’observe à partir des cancers micro-invasifs tandis que c-erbB-2 n’apparaît qu’au stade invasif. Dans la séquence d’apparition des anomalies génétiques conduisant au cancer invasif, l’atteinte d’EGF-R précède la néoangiogénèse.