Résumé : Malgré l’existence de différents vaccins protecteurs à l’égard des infections par B. pertussis, la coqueluche reste une maladie infectieuse fréquente et est encore actuellement responsable de 300.000 décès par an dans le monde. Une meilleure compréhension des réponses immunitaires induites par les principaux facteurs de virulence de B. pertussis est donc importante afin d’optimaliser la vaccination. Alors que le rôle des anticorps dans la protection contre la coqueluche est reconnu depuis de nombreuses années, celui des réponses d’immunité cellulaire a été identifié mais est moins bien caractérisé.

Dans ce travail, nous avons analysé différents aspects des réponses d’immunité cellulaire induites par deux antigènes majeurs de B. pertussis, l’hémagglutinine filamenteuse (FHA) et la toxine pertussique (PT) chez des nourrissons. Nous avons étudié la persistance des réponses spécifiques des antigènes de B. pertussis après la primo vaccination des nourrissons et caractérisé différents facteurs qui modulent ces réponses, nous permettant ainsi de comprendre l’hétérogénéité des réponses d’immunité cellulaire observées tant qualitativement que quantitativement.

Nous avons montré que les réponses immunitaires spécifiques de la FHA et de la PT pouvaient persister jusqu’à neuf mois après la dernière administration du vaccin contre la coqueluche. Ces réponses immunitaires sont caractérisées par une production d’interféron-gamma (IFN-) par les cellules sanguines circulantes (PBMC), par une prolifération lymphocytaire ainsi que par une production d’anticorps. Bien que les lymphocytes T CD8+ participent à la sécrétion spécifique d’IFN-, leur participation semble quantitativement moins importante que celle des lymphocytes T CD4+ et dépendante de ces derniers. Cependant, les PBMC de certains enfants vaccinés ne produisent pas ou peu d’IFN- après stimulation in vitro par les antigènes de B. pertussis. Cette inhibition, voire absence, de réponse immunitaire de type Th1 spécifique est associée à une sécrétion constitutive d’IL-10 par les monocytes ou à la présence de lymphocytes T CD8+. Enfin, étant donné que la FHA est inductrice d’IL-10 dans un modèle in vitro murin, nous avons analysé son effet sur la production in vitro de cette cytokine par les cellules dendritiques humaines (DCs). Nous avons montré que la FHA induit bien une production d’IL-10 par les DCs mais également les productions d’IL-12p70, d’IL-6 et d’IL-23, cytokines impliquées dans la différenciation des lymphocytes T naïfs en lymphocytes T effecteurs Th1 ou Th17. Parallèlement, nous avons testé une forme tronquée de FHA, la FHA 44 qui est également protectrice dans un modèle murin d’infection par B. pertussis. Nous avons montré que cette FHA tronquée n’induit pas de production d’IL-10 tout en induisant une production d’IL-12p70 et d’IL-23 par les DCs. La forme moléculaire de FHA présente dans les vaccins joue donc un rôle déterminant sur le type de réponses immunitaires induites et le remplacement de la FHA native dans les vaccins acellulaires par la FHA 44 devrait potentiellement permettre une meilleure réponse IFN- par les PBMC des enfants vaccinés.

La caractérisation dans ce travail des réponses immunitaires induites par les vaccins contre la coqueluche chez les jeunes enfants nous a donc d’une part permis d’identifier différents facteurs de l’hôte associés à des réponses d’immunité cellulaire suboptimales chez les enfants vaccinés, et d’autre part d’identifier une forme moléculaire de FHA susceptible d‘induire des réponses d’immunité cellulaire plus adéquates. Nous avons en outre mis en évidence la persistance des réponses d’immunité cellulaire et humorale chez des enfants de 13 mois dont la primo vaccination s’était achevée à l’âge de 4 mois. La poursuite de ce travail comporte la caractérisation des réponses mémoires à l’égard des antigènes de B. pertussis chez des enfants ayant jusqu’à 10 ans.