Résumé : Par rapport à l’adulte, le nouveau-né présente une susceptibilité accrue aux agents infectieux et au développement d’allergies. Une polarisation de l’immunité acquise vers des réponses de type Th2, productrices d’IL-4, d’IL-5 et d’IL-13, et un défaut de réponses immunes de type Th1, sécrétant de l’IFN-γ, peuvent rendre compte de ce statut immunitaire particulier. De plus, un retard de production et de maturation des anticorps, caractéristiques de l’immunité humorale, s’observe en début de vie.

Récemment, de nouveaux lymphocytes T auxiliaires ont été décrits, les lymphocytes Th17, producteurs d’IL-17A, d’IL-17F et d’IL-22, d’une part, et les lymphocytes Tfh, sécrétant de l’IL-21 et exprimant CXCR5, ICOS et PD-1, d’autre part. La différenciation des lymphocytes Th17 dépend de la présence d’IL-6 ou d’IL-21 et de TGF-β, et est inhibée par l’IL-4 ; tandis que les lymphocytes Tfh sont induits en présence d’IL-21, d’IL-6 et du répresseur transcriptionnel Bcl6. Alors que les lymphocytes Th17 sont associés à des réponses inflammatoires par le recrutement de neutrophiles, les lymphocytes Tfh aident les lymphocytes B à produire des anticorps de haute affinité.

L’objectif principal de notre travail est l’étude du développement potentiel de réponses de type Th17 chez le nouveau-né de souris soumis à une stimulation allogénique et au manque d’IL-4. De plus, l’existence potentielle de lymphocytes Tfh induits chez le nouveau-né immunisé avec un vaccin constitué d’ovalbumine de poulet et d’Alum, sera investiguée.

Dans notre modèle de tolérance néonatale, l’immunisation de nouveau-nés BALB/c à l’aide de cellules spléniques semi-allogéniques F1 (AJAX x BALB/c) induit une polarisation de type Th2, associée à l’établissement d’un chimérisme lymphoïde et à l’acceptation d’une greffe de peau présentant les alloantigènes rencontrés à la naissance. Des nouveau-nés soumis à cette immunisation allogénique et à la privation d’IL-4, réalisée par l’utilisation d’anticorps monoclonaux ou de souris IL-4-/-, rejettent de façon aiguë les greffons de peau et présentent une proportion réduite de cellules chimériques. Cette rupture de la tolérance néonatale est associée à l’inhibition de la réponse allospécifique de type Th2 et au développement de lymphocytes Th17 alloréactifs, produisant de l’IL-17A. L’inhibition de la voie Th17 ne conduit toutefois pas à l’acceptation des allogreffes de peau. Par contre, la neutralisation de l’IL-6 ou de l’IL-17A et la réduction du nombre de neutrophiles restaurent la proportion de cellules chimériques présentes dans la rate, démontrant que la réponse de type Th17 allospécifique néonatale contrôle le chimérisme lymphoïde.

En réponse au vaccin OVA-Alum, les nouveau-nés présentent une proportion accrue de lymphocytes Tfh CXCR5+ PD-1+, bien que cette proportion lymphocytaire soit significativement diminuée par rapport aux adultes. Les lymphocytes Tfh néonataux expriment en outre des taux moindres des ARNm d’IL-21, d’IL-4 et de Bcl6, suggérant que la génération de lymphocytes Tfh est altérée en début de vie. En parallèle, les titres et la maturation des anticorps produits suite à la vaccination sont réduits chez les nouveau-nés, en comparaison avec les adultes. Cependant, qu’ils soient déficients en IL-4 ou non, des lymphocytes T CD4+ néonataux activés in vitro en présence d’IL-6 induisent une production d’anticorps par des lymphocytes B compétents, suggérant qu’il n’y a pas de défaut intrinsèque des lymphocytes T du nouveau-né à développer une capacité d’aide aux lymphocytes B.

En conclusion, nous avons montré que la polarisation de type Th2 néonatale inhibe la différenciation de lymphocytes Th17 alloréactifs contrôlant le rejet de cellules allogéniques, un mécanisme pouvant intervenir dans la relation immunitaire entre la mère et l’enfant. Nos résultats indiquent également que le nouveau-né est capable de différencier des lymphocytes Tfh, bien que le développement de ces derniers semble réduit. \