Résumé : Le métabolisme des cellules souches embryonnaires est étroitement régulé par un équilibre entre

auto-renouvellement et différenciation. Ces cellules peuvent proliférer en culture de manière prolongée,

tout en restant indifférenciées, mais cela peut engendrer l’apparition d’anomalies karyotypiques, qui

accentuent la prolifération de ces cellules au détriment de leur potentiel de différenciation. Ce

phénomène d’adaptation à leurs conditions de culture et leurs caractéristiques communes avec les

cellules cancéreuses sont deux preuves majeures de la nature tumorigène de ces cellules souches.

Le but de ce travail a été d’élucider les voies de signalisation qui contrôlent le métabolisme des

cellules souches embryonnaires humaines, et plus particulièrement, leur différenciation. De plus, nous

avons souhaité étudier le caractère tumorigène de ces cellules et pour cela, nous avons travaillé en

comparant différentes lignées de cellules souches embryonnaires avec une lignée de carcinome

embryonnaire humain, leurs correspondantes cancéreuses. Nous avons choisi d’étudier la voie des

dérivés de l’inositol, dont la composante PI3K/AKT avait déjà été auparavant associée avec le

métabolisme des cellules souches embryonnaires murines, tout comme la composante des inositols

phosphates solubles qui avait été impliquée dans le contrôle de l’auto-renouvellement de ces cellules.

Nous avons tout d’abord étudié la distribution des inositols phosphates dans ces différents

modèles par HPLC et observé que leur profil différait entre les cellules souches embryonnaires normales

et cancéreuses, principalement au niveau de la quantité d’InsP5. L’analyse du profil des InsPs en cours de

différenciation spontanée a permis par la suite de mettre en évidence des modulations de ces différents

métabolites, avec notamment une diminution reproductible d’InsP5. Nous basant sur l’hypothèse que ces

modulations devaient se refléter au niveau de l’expression des enzymes régulant la production des

inositol phosphates, nous avons entamé une analyse par qPCR des kinases et phosphatases principales

impliquées dans cette voie. Nous avons effectivement pu mettre en évidence une augmentation

significative de deux isoformes de la triphosphate 3-kinase, ITPKB et ITPKA, en cours de différenciation

spontanée. Ces deux enzymes sont également davantage exprimées dans les cellules souches cancéreuses.

Ces augmentations d’expression ont ensuite pu être confirmées au niveau protéique pour ITPKB et au

niveau de leur activité enzymatique. Par ailleurs, au cours de ce travail, nous avons également mis au

point un modèle de différenciation dirigée de nos cellules souches embryonnaires vers des cellules

souches mésenchymateuses, que nous avons entièrement caractérisées et dont nous avons pu mettre en

évidence les propriétés immunomodulatrices. Des résultats préliminaires sont venus confirmer, dans ce

modèle, l’augmentation d’ITPKB préalablement observée en cours de différenciation spontanée.

Nous avons également montré que l’expression du gène suppresseur de tumeur PTEN était

augmentée en cours de différenciation spontanée des cellules souches embryonnaires humaines. A l’aide

de la technique d’immunofluorescence, nous avons mis en évidence une localisation subcellulaire

différente de PTEN dans nos cellules souches embryonnaires normales par rapport à leur

correspondantes cancéreuses ainsi qu’une plus faible expression de PTEN dans ces dernières, confirmant

ainsi nos résultats obtenus précédemment par qPCR. PTEN est le principal inhibiteur de la voie

PI3K/AKT dont nous avons également disséqué l’expression des effecteurs majeurs par qPCR. Nous

avons notamment mis en évidence une augmentation de l’expression des unités régulatrices p85α et

catalytique p110β en cours de différenciation. Ces mêmes enzymes étaient également surexprimées dans

les cellules de carcinome embryonnaire préalablement différenciées à l’aide d’acide rétinoïque.

En conclusion, l’ensemble de ces résultats met en évidence une modulation des voies de

signalisation dérivées de l’inositol en cours de différenciation spontanée et dirigée des cellules souches

embryonnaires, suggérant leur implication dans le contrôle de la différenciation de ces cellules. Nous

avons également observé des différences entre les cellules souches embryonnaires normales et

cancéreuses, dont l’étude devra être approfondie afin d’évaluer l’impact de ces divergences sur le risque

de transformation cancéreuse des cellules souches embryonnaires humaines.