Résumé : Les changements politiques qui ont eu lieu dans les pays de l’Est européen depuis 1989 ont eu pour conséquence l’ouverture des frontières des ex-pays communistes, facilitant les départs et les retours des leurs citoyens. La transformation économique qui se poursuit dans cette région de l’Europe a toutes ces conséquences : la hausse du chômage, les salaires très peu élevés, les difficultés économiques observées notamment dans les régions rurales etc. Tout cela provoque un déplacement de personnes qui, cherchant leur terre d’exile, cherchant une vie meilleure, se dirigent de l’Est vers l’Ouest du continent.

En 1991, le Royaume de Belgique a changé la législation concernant les citoyens polonais en leur accordant l’entrée libre, sans visas, pour un séjour touristique de trois mois. Cette modification de la loi a initié une nouvelle vague migratoire provenant de Pologne.

Notre étude concerne le milieu immigré polonais de Bruxelles, avec une prise en considération particulière de la question de la naissance et le fonctionnement d’un nouveau type d’organisation sociale qu’est la communauté transnationale. L’approche théorique de cette recherche est basée sur les études récentes relatives aux communautés transnationales. A partir de travaux de Alejandro Portes, Douglas Massey et Saskia Sassen, Robert Cohen et Steven Vertovec nous pouvons définir une communauté transnationale comme une nouvelle forme de vie sociale qui est composée d’immigrés vivant dans le pays d’accueil, des familles et des enfants des migrants qui sont dans le pays d’origine, d’anciens immigrés qui sont déjà rentrés dans leur pays d’origine et des migrants potentiels. Les communautés transnationales développent leurs propres entreprises, organisations, institutions et différentes formes de dépendances qui permettent à leurs membres de vivre et travailler dans le pays d’immigration, même sans avoir ni le permis de séjour ni le permis de travail. Le réseau de liens et d’organisations aide aussi la circulation des biens, des fonds financiers, ainsi que des informations entre le pays d’accueil et le pays d’origine.

Le but de cette recherche est de vérifier l’hypothèse qu’actuellement à Bruxelles se développe une communauté transnationale d’immigrés polonais illégaux. Cette communauté aide les migrants à exister en même temps dans les deux pays ; par exemple gagner de l’argent à Bruxelles et continuer la construction d’une maison dans le village natal, travailler en Belgique et élever des enfants qui sont en Pologne. Nous analysons la formation, les logiques de fonctionnement et l’évolution de la communauté transnationale polonaise implantée à Bruxelles ainsi que les organisations et les institutions, entre autres informelles, aidant les Polonais qui vivent sur le sol belge. Les questions liées à la problématique de l’emploi des immigrés polonais à Bruxelles constituent des éléments importants de notre recherche. L’accès des immigrés polonais au marché informel de l’économie belge, le fonctionnement du secteur du travail illégal, les métiers ethniques, la dynamique d’insertion des Polonais sur le marché de l’emploi bruxellois, les relations entre les patrons belges et les employés polonais ainsi que l’existence du secteur informel des entreprises polonaises nous semble particulièrement intéressant à développer dans le cadre de notre recherche.

Une analyse approfondie de la communauté polonaise de Bruxelles représente un intérêt non négligeable tant pour la Région de Bruxelles – Capitale que pour l’Etat belge, notamment à cause de l’ampleur de cette immigration. Les ressortissants polonais séjournant en Belgique constituent le premier groupe migrant parmi tous les immigrés originaires de l’Europe centrale et orientale. Dans ce contexte, il nous semble intéressant de connaître cette communauté qui se développe sur le sol belges depuis déjà 15 ans sans aucun statut officiel pendant plusieurs années.