Résumé : La connaissance de la dynamique des écosystèmes forestiers face à l’anthropisation est plus qu’indispensable à l’établissement de bases satisfaisantes pour leur utilisation durable et rationnelle. Ces perturbations anthropiques sont à la base de la fragmentation des forêts et de l’augmentation des lisières. Ainsi, depuis plus de trois-quarts de siècle la notion de « lisière » préoccupe la communauté scientifique. La grande diversité des espèces qui lui est associée est connue comme le principe de « l’effet de lisière » et est largement considéré comme un concept fondamental de l’écologie. Après l’énonciation de ce principe, les gestionnaires de la faune avaient estimé créer autant de lisières que possible du fait que la plus grande diversité de la faune y était observée. Paradoxalement, en accordant plus l’accent sur la faune au cours des deux dernières décennies, nombreuses caractéristiques des lisières, désormais considérées comme néfastes, ont été mises en évidences. C’est ainsi que des études sur la compréhension des réponses écologiques de la faune face aux lisières se sont multipliées afin de parvenir aux recommandations adéquates pour une meilleure conservation. La présente étude a pour but de tester si les Rongeurs peuvent servir comme bioindicateurs des effets de lisière dans la forêt de Masako. Les captures ont été faites durant 38 mois à l’intérieur de 4 grilles d’échantillonnage (1 ha/grille/habitat) installées dans une forêt à Gilbertiodendron dewevrei, une forêt secondaire vieille, une jachère d’au moins 5 ans et une lisière jachère/forêt secondaire. Les espèces ont été identifiées à l’aide de données morphométriques et d’analyses moléculaires (ADN du Cyt b). La richesse, la diversité, la densité, les abondances, le sex-ratio et la structure d’âges des espèces capturées ont été analysés. Une richesse et une diversité élevées sont observées dans la lisière probablement suite à son hétérogénéité et à la présence d’une diversité de niches sur une surface réduite. Les abondances de différentes espèces y sont en général faibles mais quelques fois intermédiaires ou similaires à celles des milieux adjacents. Quatre groupes d’espèces ont été distingués : (i) les généralistes ; (ii) celles qui évitent la lisière (faibles abondances dans la lisière) ; (iii) celles ayant des abondances distinctes selon les habitats ; (iv) celles ayant des abondances intermédiaires dans la lisière. L’étude a montré que les Rongeurs pourraient bien servir comme bioindicateurs des effets de lisière. Leur diversité et abondance étant des paramètres prioritaires à analyser.