Résumé : Le travail retrace l’évolution du métier de journaliste de presse écrite en République démocratique du Congo (RDC) et en Côte d’Ivoire, de la fin de la période coloniale à nos jours. Plus précisément, il s’attache à en comprendre l’émergence et la structuration progressive, à Léopoldville (devenue Kinshasa) et à Abidjan. L’objectif consiste à dégager les éléments qui ont modelé le métier dans les deux pays, pour mieux comprendre la forme qu’il emprunte aujourd’hui.

La recherche se fonde principalement sur l’exploitation d’une centaine d’entretiens menés pour la plupart à Kinshasa et à Abidjan, sur l’exploitation de corpus de presse et sur l’exploitation de ressources documentaires et bibliographiques. Elle adopte une perspective comparative visant à mettre en évidence les similitudes et les spécificités qui ont marqué l’évolution du journalisme de presse écrite en RDC et en Côte d’Ivoire.

Le travail se divise en quatre parties, dont les trois premières s’arrêtent sur des moments importants de la structuration de la profession. La première présente la façon dont les Congolais et les Ivoiriens se sont investis progressivement dans le journalisme de presse écrite, particulièrement à la fin de la période coloniale, dans un contexte de pluralisme limité. La deuxième étudie la pratique du journalisme et sa structuration, au Congo et en Côte d’Ivoire, durant le long règne des partis uniques. La troisième partie analyse la nouvelle forme que revêt la profession depuis la libéralisation politique et médiatique du début des années 1990. Pour chaque période, l’analyse comporte trois axes destinés à mettre en évidence les éléments utiles à la comparaison. Le premier permet de mettre au jour le système relationnel qui existe autour des journalistes congolais et ivoiriens de presse écrite, afin d’identifier les facteurs sociétaux qui influencent leur pratique. Le deuxième axe dévoile les dynamiques internes du groupe professionnel, dans les deux pays. Enfin, le troisième axe se construit autour des parcours individuels d’un certain nombre de journalistes, ce qui permet de cerner leurs motivations et leur perception du métier.

L’approche comparative constitue la quatrième partie de la recherche. Elle s’appuie sur le concept de « configuration » de Norbert Elias pour corréler les trois axes et les trois périodes décrits ci-dessus, pour penser l’émergence et l’évolution de la profession en termes de relations, d’interdépendances et de négociation.

L’imprécision des contours du groupe, des profils professionnels et des pratiques apparaît constitutive du journalisme de presse écrite, au Congo et en Côte d’Ivoire. La forme que revêt aujourd’hui la profession résulte d’une suite d’interdépendances, régulièrement renégociées, qui lie les journalistes aux autres acteurs au cours du temps./

The thesis traces the development of the profession of newspaper journalist in the Democratic Republic of Congo (DRC) and Côte d’Ivoire, from the end of the colonial era until today. More precisely, it seeks to understand its emergence and structural development in Léopoldville (Kinshasa) and Abidjan. The objective is to identify the elements that fashioned the profession in both countries so as to better understand its current form.

The research rests chiefly on the use of about 100 interviews conducted for the most part in Kinshasa and Abidjan as well on the use of press corpuses and of documentary and bibliographic resources. The research takes a comparative approach that aims to highlight the similarities and specificities that have marked the evolution of newspaper journalism in the DRC and Côte d’Ivoire.

The thesis is divided into four parts, the first three of which concentrate on key moments in the profession’s structural growth. Part One outlines the way in which the Congolese and Ivorians gradually became involved in print journalism, in particular at the end of the colonial era, in a context where pluralism was limited. Part Two studies the practice of journalism and its structural elaboration, in the Congo and Côte d’Ivoire, under the long reign of the one-party systems. Part Three examines the new form assumed by the profession since the political and media liberalization of the early 1990s. For each period, the analysis relies on three axes destined to emphasize the elements that are useful for the comparison. The first axis makes it possible to reveal the network of relations existing around Congolese and Ivorian newspaper journalists in order to identify the societal factors influencing their practice. The second axis sheds light on the professional body’s internal dynamics in the two countries. Lastly, the third axis centres on the individual careers of a number of journalists, making it possible to grasp their professional motivations and their perception of the sector.

The comparative approach composes the fourth part of the thesis. It relies on Norbert Elias’s notion of ‘configuration’ to correlate the three axes and periods described above in order to examine the profession’s emergence and evolution in terms of relations, interdependencies and negotiations.

The vagueness of the group’s contours, of the professional profiles and of the practices appears constitutive of newspaper journalism in the Congo and Côte d’Ivoire. The profession’s current form is the result of a succession of interdependencies, regularly renegotiated, that has linked the journalists to other actors over the course of time.