par De Brouwer, Christophe ;Bayou, Meriem;Nde, Francis;Wangata Shadi, Jemima ;Mahau, Claude ;Rezette, Jean-Pierre
Référence Sur- et sous-médicalisation, surdiagnostics et surtraitements (4ème Colloque de Bobigny: 17 et 18 avril 2015: Faculté de médecine. Bobigny. Paris)
Publication Non publié, 2015-04-17
Poster de conférence
Résumé : L'OICS montre une Belgique au top, depuis des années, dans la prise des anxiolytiques par habitant. Presque le double de la France qui se situe elle-même dans les 5 premiers consommateurs mondiaux d'anxiolytiques par habitant.Différentes études en France ont été menées par l'INPES (INSERM, 2012) pour essayer de corréler une consommation chez les actifs. Les données montrent que le lien existe dans le contexte d'une augmentation de la consommation entre décade. Cette consommation, par ailleurs, a tendance à diminuer dès l'âge légal de la pension. Plus d'un tiers des actifs ont consommé des psychotropes, c'est à dire entre 18 et 64 ans.Il semble dès lors licite de se poser la question d'un lien de causalité entre les nouvelles organisations du travail et la prise d'anxiolytique. Si les études concernant les dimensions du stress en entreprise sont nombreuses (Lassalle et al, 2015), nous manquons cependant d'études étiologiques concernant l'anxiété.Les méthodes organisationnelles, désignées par le terme de « l'excellence » en entreprise, concept introduit par le bureau Mac Kinsey en 1977 (Peters et al, 1981), sont qualifiées de « managinaire » par Aubert et Gaulejac (1991), qui pointent l'irruption du domaine comportemental et imaginaire dans le management, et qui seraient de nature à provoquer des troubles anxieux (les auteurs estiment qu'elles portent une charge schizophrénique). En tout état de cause, on se trouve devant plusieurs paradoxes. Nos réglementations ont connu une inflation tout à fait remarquable sur le stress au travail et plus généralement le domaine psycho-social. Mais quasi rien quant aux organisations de travail anxiogènes. Il est vrai que nous sommes dans un domaine nettement plus médico-social. Dans le même temps, ces nouvelles organisations, sans délaisser les techniques stressogènes en entreprise, favorisent la prise notamment de stimulants psychiques et d'anxiolytiques, qui eux-mêmes sont de nature à provoquer une dépendance à caractère anxiogène (Healy David, 2009). Autre paradoxe, la prise de psychotropes, apparemment, coûte cher aux entreprises en terme d'accidents, ou de diminution de productivité. Un grand nombre d'études ont investigué cette dimension (Sledge et al, 2014).Une proposition pourrait se situer d'une part dans un modification drastique de l'accès à ces drogues psychoactives et d'autre part dans une modification de ces nouvelles organisations du travail. Constatons que ce couple formé par une organisation « managinaire » du travail et l'exposition à des psychostimulants/anxiolytiques est probablement particulièrement sensible aux techniques de vente des industries pharmaceutiques qui trouvent un de leur fondement précisément dans l'imaginaire. Références :Aubert Nicole & de Gaulejac Vincent. Le coût de l'excellence. Seuil, 1991.de Brouwer Christophe. Le travailleur en miettes ? Opinion. La Libre Belgique du 6 janvier 2015. http://www.lalibre.be/debats/opinions/le-travailleur-en-miettes-54ac3f553570d587e32581afDejours Christophe. L'évaluation du travail à l'épreuve du réel. INRA, 2003.Expertise collective. Médicaments psychotropes. Consommations et pharmacodépendances. Inserm, 2012.Healy David. Psychiatric drugs explained. 5th edition, 2009. Traduction et adaptation française : Debauche Monique. Les médicaments psychiatriques démystifiés. Elsevier, 2009.Lassalle M, Chastang JF, Niedhammer I. Working conditions and psychotropic drug use : cross-sectionnal and prospective results from the french national SIP study. Psychiatric Research 2015, Accepted.Peters Tom, Waterman Robert H. Le prix de l'excellence (« In search of Excellence », 1981). Traduction française Dunod, 2012.Sledge WH, Lazar SG. Workplace effectiveness and psychotherapy for mental, substance abuse, and subsyndromal conditions. Psychodyn Psychiatry 2014 ; 43 : 497-556.