Travail de recherche/Working paper
Résumé : La recherche sur les réformes publiques inscrite dans la tradition des sciences administratives et politiques recouvre trois orientations (Hood, 2005) : dans les années ’80 un travail analytique centré sur la nouvelle gestion publique, dans les années ’90 l’élaboration d’une base de données et d’informations sur les réformes publiques (Aucoin, 1995; Politt, Bouckaerts, 2000) et enfin plus récemment l’identification d’anomalies dans ces réformes (notamment Margetts, Perri6, Hood, 2010; Bezes, 2005, 2006). La recherche en gestion est centrée sur l’action et non pas sur les institutions ou les acteurs : elle vise en termes positifs à la construction d’une théorie de l’action et en même temps en termes normatifs à proposer des pistes d’action (Hatchuel, 2000). La recherche en management public recouvre ainsi des analyses des réformes ainsi que des approches conduisant à la prise de responsabilité (« a responsibility-base approach ») (Schedler, Proeller, 2010) plus normatives et tournées vers la recherche de solutions. Cette contribution s’inscrit à fois dans la perspective de l’analyse des anomalies dans les réformes publiques (pourquoi les réformes produisent-elles des anomalies, quelle en est la nature ?) et dans la proposition de pistes pour en limiter la portée (comment résoudre les anomalies ?). Une première ambition est de proposer une analyse pertinente des pathologies et des paradoxes dans les réformes publiques mises en oeuvre dans les pays de l’OCDE dans deux domaines centraux : les réformes budgétaires d’une part et les réformes de la haute fonction publique d’autre part. Ces réformes sont centrales dans la réforme de l’État puisqu’elles touchent d’une part à l’architecture du budget et d’autre part à la responsabilité et au rendu des comptes des hauts fonctionnaires. Alors que les comparaisons internationales sont fréquemment utilisées pour produire un savoir commun, ce ne sont pas toujours les travaux les plus scientifiques qui sont les plus cités comme le rappelle Pollitt (2011). Le champ de l’analyse comparative des politiques publiques s’est pourtant considérablement développé, ces dernières années, il n’y a cependant pas de paradigme dominant qui se soit imposé chez les chercheurs : théories comparatives au niveau institutionnel, culturel ou organisationnel (Pollitt, 2011). La comparaison reste un exercice complexe et s’agissant de notre sujet, il ne suffit pas de constater des succès ou des échecs dans les réformes mais bien de comprendre dans quelle mesure la réforme elle-même, le contexte institutionnel, des enjeux culturels et organisationnels expliquent le résultat. La seconde ambition est d’ouvrir la discussion sur le terrain de l’action : en d’autres termes de passer de la question du pourquoi à la question du comment. Ces deux questions sont en fait intrinsèquement liées. S’arrêter au pourquoi revient à renvoyer purement les réformes pour vice de forme sans qu’aucune alternative ne soit vraiment proposée si ce n’est un retour en arrière généralement problématique. Envisager le comment sans considérer la source des anomalies conduit à répéter voire à propager les mêmes erreurs non identifiées. Ce n’est qu’en liant les deux questions qu’il est possible de définir une troisième voie entre les recommandations de « bonnes pratiques » faciles à transférer d’un pays à l’autre (type OCDE) et l’affirmation de la « non-exportabilité » des réformes pour des raisons et contraintes notamment institutionnelles (Politt, 2003).