Résumé : En déposant sa candidature aux élections présidentielles guatémaltèques, Rigoberta Menchú a accepté d'endosser une lourde responsabilité : la représentation au sein de la politique partisane de deux identités collectives minorisées, à savoir les femmes et les indigènes mayas. Partant du postulat théorique que les discours politiques sont les instruments d'une reconfiguration symbolique des rôles et des places en politique, cet article analyse la façon dont la militante indigène a construit sa rhétorique dans le but de promouvoir la reconnaissance de deux identités marginalisées. Au cœur de tout son discours politique, on retrouve un paradigme dominant : celui de la complémentarité. L'argumentation en termes de complémentarité lui permet de combiner deux revendications a priori peu compatibles, l'appel à un respect des différences (tant de genre que de culture) et la promotion d'une politique égalitariste. Ce paradigme, que l'on observe déjà dans son livre-témoignage sur la vie des mayas durant la guerre civile, traverse sa campagne électorale avec une remarquable cohérence. Néanmoins, sa candidature se soldera par une déroute électorale. Sans prétendre apporter de réponses définitives, l'article soulève quelques questions à même d'éclairer les raisons d'un tel échec.