Résumé : Au cours du mois d’août 1941, une jeune femme du nom d’Andrée De Jongh traverse la Belgique et la France, en compagnie de soldats belges et d’un soldat britannique, dans le but de les rapatrier à Londres pour qu’ils reprennent le combat. Arrivée dans le Sud de la France, dans les environs de Bayonne, Andrée De Jongh entame une traversée nocturne des Pyrénées avec ses « colis ». En Espagne, elle se rend à Bilbao au consulat britannique où elle négocie des accords officieux avec les Anglais quant à l’existence de son organisation clandestine. De cette collaboration belgo-britannique est née la « ligne Dédée », plus connue sous le nom de : « La Comète ». La ligne d’évasion Comète est considérée comme étant le plus grand réseau d’évasion belge. Elle est à l’origine de plus ou moins 700 à 800 évacuations d’aviateurs de la Royal Air Force, à répartir de 1941 à 1944. La particularité de Comète, suite aux accords établis entre les représentants de la section M.I.9 et Andrée De Jongh, est son indépendance d’action à la fois vis-à-vis du gouvernement britannique, et du gouvernement belge en exil. Il est décidé que l’organisation resterait sous la direction de civils et non d’agents formés par les services secrets. En échange de quoi, Comète s’engage à évacuer prioritairement des aviateurs de la R.A.F. Pourvue d’une infrastructure complète, Comète est divisée en trois grandes zones géographiques qui s’étendent entre la Belgique, la France et l’Espagne. Le fonctionnement d’un réseau d’évasion se structure en plusieurs étapes : cacher, nourrir, loger, convoyer de pays en pays. C’est pourquoi, 2000 personnes de nationalité belge, française et espagnole ont été recrutées pour réaliser cette mission. Parmi ces agents, les femmes auraient été très nombreuses et très actives dans le fonctionnement du réseau. A partir de témoignages d’anciens résistants de Comète, nous nous sommes attelés à analyser quel était l’engagement des femmes dans la ligne d’évasion. Pouvons-nous considérer ce réseau comme étant une exception quant à l’importance numérique et hiérarchique des femmes ? La personnalité et le sexe du fondateur, Andrée De Jongh, ont-ils eu un impact sur le recrutement des femmes et l’importance qu’on leur accordait ? Quelles fonctions leur étaient confiées et pourquoi ? Etaient-elles davantage des logeuses, des courriers, des boîtes-aux-lettres et des agents de liaison ou bien ont-elles géré des fonctions leur permettant de s’émanciper hors de la sphère privée, réservée à la femme à cette époque ? Pour répondre à ces questions, les sources orales sont complétées par les archives de la Sûreté de l’Etat, les archives personnelles d’individus liées directement ou indirectement à Comète (conservées au Ceges), les dossiers nominatifs d’anciens résistants classés au Service des Victimes de la Guerre, et les interviews réalisées par la Fondation Auschwitz. Après examen de l’ensemble des sources orales et écrites, nous avons constaté que Comète est effectivement marquée par une forte présence féminine, mais que cette présence est nuancée par des activités diverses et par un profil-type de la résistante différent selon l’une ou l’autre fonction. En restant conscient que l’échantillon est fragile, nous avons pu comprendre les raisons qui ont poussé des femmes à s’engager dans la résistance, et les conséquences de cette expérience sur leur vie de femme pendant et après la guerre.