Résumé : Le rhodium est utilisé en catalyse dans un grand nombre de réactions. En catalyse homogène, il sert entre autres à produire de l'acide acétique. En catalyse hétérogène, s'il permet la formation d'hydrocarbures à chaînes courtes (C2-C4) à partir du gaz de synthèse, le rhodium est certainement plus connu pour sa capacité à convertir sélectivement les NOx en N2. Dans le domaine de la dépollution, le rhodium peut être utilisé comme réserve d'oxygène (Rhx-Oy) pour rendre possible l'oxydation du CO sous conditions pauvres (conditions où le rapport Air/Fuel est petit). Ce dernier point motive l'étude de la chimisorption de l'oxygène sur le rhodium. L'étude de l'influence de l'oxygène sur plusieurs faces cristallines de rhodium est rendue possible grâce à la microscopie ionique à effet de champ électrique (FIM). Dans son principe, la FIM n'est guère compliquée. Schématiquement, il s'agit de mettre en image un échantillon métallique conditionné sous la forme d'une très fine pointe constituant l'anode du système. L'extrémité de la pointe est assimilée à un hémisphère de 5 à 50 nm de rayon de courbure. En face de cette pointe se trouve un écran fluorescent faisant office de cathode. L'échantillon est soumis à une tension positive de quelque 10 kV de manière à produire un champ électrique local avoisinant les 30-50 V/nm. Des ions sont produits dans le voisinage immédiat de la surface par l'application du champ sur les atomes ou les molécules d´un gaz préalablement introduit que l'on appelle gaz révélateur (He, Ne à 10-3 Pa). L'information est transportée grâce aux cations projetés radialement. L'agrandissement est de l'ordre du million de fois et la résolution comprise entre 2 et 3 angströms, assurant une résolution atomique de la surface. L'image visible représente environ deux tiers d'un hémisphère. La symétrie de l'image permet de déterminer par quelle face cristalline est orienté l'hémisphère; de même, le comptage des plans réticulaires permet la détermination du rayon de courbure de la pointe. Ce travail a pour objet l'étude de l'interaction locale entre l'oxygène et les faces à marches du rhodium {110} et {113}. Nous analysons en outre les changements morphologiques dus à la communication entre les surfaces rugueuses {210} et {731} et nous observons les similitudes et différences entre les reconstructions induites par la ségrégation des atomes d'oxygène présents dans le volume et celles induites par adsorption directe. Nous tentons de regrouper des résultats obtenus par d'autres méthodes expérimentales (STM, LEED). Ainsi, Dhanak et al. observent par la microscopie à effet tunnel (STM) une reconstruction de type chaînes manquantes (1x2) de la face (110) du rhodium pour une dose de 6 langmuirs d'oxygène (1 L = 1,33∙10-4 Pa∙s). De même, Leibsle et al. constatent par diffraction des électrons de faible énergie (LEED) divers motifs de reconstruction de type chaînes manquantes selon le taux de recouvrement de la face (110) du rhodium : (1x2), (2x6), (2x8). Par la LEED, Tucker met en évidence la transformation de la face (210) en facettes (731). Nous menons nos études pour de faibles taux de recouvrement (thêta = 0,1-0,2) et nous visualisons sur une seule surface les transformations précitées, c'est à dire les reconstructions à chaînes manquantes (1x2) des faces {110} et {113}, et l'extension des faces jumelles {731}. Les reconstructions sont des phénomènes thermiquement activés. D´une manière générale, le cristal cherche sa forme la plus stable. Thermodynamiquement, le cristal cherche une forme pour laquelle l'énergie libre superficielle atteint un minimum. Ainsi, l'effet de la diminution de la tension superficielle surcompense celui de l'agrandissement de la superficie. Nous sommes certains que les transformations observées sont induites par l'oxygène puisque les mêmes expériences menées sans oxygène ont abouti à des résultats négatifs. Dans ce travail, nous prouvons par FIM que les reconstructions et les changements morphologiques se produisent déjà pour des taux de recouvrement inférieurs à thêta = 0,5 (thêta = 0,1-0,2). Les faibles taux de recouvrement suggèrent l'existence d'une interaction à longue distance, soit directe entre les atomes d'oxygène adsorbés, soit indirecte via le substrat métallique.