par Darras, Hugo
Président du jury Detrain, Claire
Promoteur Aron, Serge
Publication Non publié, 2017-06-26
Thèse de doctorat
Résumé : Les Hyménoptères sociaux (abeilles, fourmis et guêpes) doivent leur succès écologique à une division dutravail marquée par l’existence de castes. Les reines sont spécialisées dans la reproduction, tandis que les ouvrières sont stériles et prennent en charge la construction du nid et sa défense, la récolte de nourriture et l’élevage des jeunes. Le développement d’un œuf femelle en une reine ou une ouvrière est généralement régi par des facteurs environnementaux, tels que la qualité ou la quantité de la nourriture.En réalisant une étude de génétique des populations chez la fourmi Cataglyphis hispanica, nous avons mis en évidence un mode de reproduction inhabituel appelé hybridogenèse sociale. Cette espèce est caractérisée par la co-existence de deux lignées génétiques au sein des populations. Les reines de chaque lignée s’accouplent systématiquement avec un mâle de l’autre lignée génétique. Ainsi, les reines de la lignée 1 s’accouplent toujours avec un mâle de la lignée 2, et les reines de la lignée 2 s’accouplent avec un mâle de la lignée 1. Les ouvrières sont issues du croisement entre les deux lignées : il s’agit donc d’individus hybrides. A l’inverse, les individus reproducteurs (nouvelles reines et mâles) sont produits exclusivement par reproduction asexuée. La caste femelle (reine ou ouvrière) est donc déterminée génétiquement; les ouvrières portent un génome hybride, alors que les reproducteurs possèdent un génome non-hybride hérité exclusivement de la mère.Les travaux réalisés dans le cadre de cette thèse de doctorat visent à comprendre l’origine et l’évolution de l’hybridogenèse sociale chez les fourmis Cataglyphis par le biais d’approches variées (génétique des populations, phylogéographie et manipulation de colonies en laboratoire). Ils sont articulés selon plusieurs axes complémentaires : la description du phénomène, l’étude de sa distribution géographique et phylogénétique au sein du genre Cataglyphis, et l'étude de ces mécanismes génétiques sous-jacents.
In eusocial Hymenoptera, such as bees, wasp and ants, it is commonly accepted that the diploid female eggs are bipotent and develop either into a queen or a worker depending on environmental factors. While conducting a population genetic study of the ant Cataglyphis hispanica, we discovered an unusual reproductive system called social hybridogenesis. Under this system, queens and workers develop from eggs with different genetic make-up. Two divergent genetic lineages coexist within a population. Queens of each lineage mate with males originating from the other lineage. Workers are produced by sexual reproduction; hence, they are first generation hybrids of the two lineages. By contrast, new queens and males are produced by thelytokous and arrhenotokous parthenogenesis, respectively. By using alternative modes of reproduction, queens appear to maximize their reproductive success by increasing the transmission rate of their genes to the reproductive offspring while benefiting from genetic diversity and heterosis effects in their worker force. Males, however, do not contribute genes to the next generation as they only sire sterile workers. This system is expected to be evolutionary short-lived as lineages may be selected to stop the production of males with null direct fitness. This PhD project aims at understanding the origin and evolution of social hybridogenesis in Cataglyphis. Using several different approaches including population genetics methods based on microsatellite makers, phylogeography and experimental manipulations on lab colonies, I explored tthe characteristics of social hybridogenesis, the genetic mechanisms underlying the system and its distribution within the genus Cataglyphis. My results, together with other recent findings, question the paradigm of environmental caste determination in eusocial Hymenoptera and suggest that genetic influences on caste determination may be more common than previously thought.