Résumé : L’objectif de cette recherche est de caractériser les discours qui construisent des acteurs-clés de l’univers politique européen en mouvance : les eurorégions. Des discours (institutionnels, économiques, médiatiques) produits en plusieurs langues au sujet de ces entités transfrontalières encore méconnues ont été recueillis sur le web, principal vecteur de la communication eurorégionale. Ils comportent au moins une occurrence du mot eurorégion ou de ses traductions. À l’aide d’une méthode qualitative adossée aux concepts éprouvés de formation discursive et de scénario sémiotique, la thèse relève les procédés mobilisés pour construire le nouveau référent collectif eurorégional. On montre notamment comment, dans le contexte spécifique de l’intégration européenne, l’appui sur l’histoire souvent fantasmée de la construction européenne encourage la transformation des acteurs frontaliers, déplace le cadre de leur action et propose les eurorégions en modèles d’une nouvelle Europe. En faisant du concept de groupe d’intérêt la pierre angulaire de l’analyse, la thèse met progressivement au jour des procédés de reconnaissance et de visibilité qui permettent aux eurorégions de devenir des entités collectives capables d’agir dans le monde social. La recherche se démarque par sa tentative d’inscrire l’analyse sémiodiscursive dans une perspective pluridisciplinaire : du point de vue méthodologique, le recours à la textométrie permet la modélisation d’un corpus multilingue non parallèle, matériau non encore traité en analyse du discours ; du point de vue de l’analyse, le recours à la science politique réactive le lien immanent entretenu par la notion de dispositif avec des enjeux de pouvoir. Il s’agit d’un travail qui tente d’apporter de nouvelles connaissances dans le champ encore peu exploré de l’analyse de discours d’appareils politico-administratifs transnationaux en lien avec le discours institutionnel européen.