Résumé : Les tumeurs sont, au moins en partie, des maladies de la régulation du cycle cellulaire. Le point de restriction (R) est un point fondamental du cycle cellulaire où les cascades de signalisation mitogéniques (y compris leurs perversions oncogènes) et l'état métabolique des cellules sont intégrés pour engager le cycle de division cellulaire. Les CDK4 et CDK6 sont les premières CDKs à être activées en réponse aux signaux de prolifération cellulaire.En initiant la phosphorylation inactivatrice de l'oncosuppresseur central pRb, les CDK4 / 6 liées aux cyclines D jouent un rôle essentiel dans le passage du point R et donc dans la décision de multiplication cellulaire, en particulier dans la plupart des cellules cancéreuses dans lesquelles l'activité de CDK4 est fortement dérégulée. Les médicaments inhibiteurs de CDK4 / 6 sont maintenant évalués dans la plupart des cancers dans de nombreux essais cliniques. Le plus avancé (Palbociclib-PD0332991) a été approuvé en 2015 par la FDA pour le traitement des cancers métastatiques du sein. Notre groupe a identifié la phosphorylation activatrice sur la Thr172 comme l'étape hautement régulée qui détermine l'activation de CDK4. La question de savoir si les phosphorylations de CDK4 et de CDK6 sont catalysées par la seule « CDK-activating kinase » (CAK, cycline H-CDK4-Mat1) reste incertaine. En utilisant des cellules de cancer colorectal (HCT116) exprimant une version de CDK7 spécifiquement inhibable (dite « analog sensitive »), nous avons participé à une étude qui démontre, d’une part, une implication cruciale de la CDK7 dans la phosphorylation / activation de CDK4 et CDK6 et, d’autre part, l'existence de kinase(s) activatrice(s) de la CDK4 différente(s) de la CDK7. De plus, cette étude a démontré que l'activité de la CDK7 était conditionnée, au moins en partie, par la liaison de p21 à la CDK4, laquelle augmentait en réponse à l'inhibition de CDK7. L’augmentation de cette liaison coïncidait avec la disparition de la phosphorylation la plus abondante de p21, que nous avons localisée (par des analyses d'électrophorèse bidimensionnelle) sur la Ser130 et que nous avons montré être catalysée par la CDK4 et la CDK2. De manière surprenante, la phosphorylation sur Ser130 de p21 était inhibée non seulement par l'inhibition de CDK7, mais également par la Roscovitine et le CR8 (inhibiteurs de CDK2) et le Palbociclib. Ensemble, ces observations suggèraient que l'inactivation de pRb et le passage de R sont contrôlés par des mécanismes de rétroaction positive dépendants de la CDK7 médiés par la phosphorylation de la p21 par la CDK4 et la CDK2 pour faciliter et maintenir l'activation de la CDK4. De plus, nos résultats confirmaient l’hypothèse de l'existence kinase(s) activatrice(s) de la CDK4 autre(s) que la CDK7. Notre groupe avait démontré précédemment que la régulation de la phosphorylation de la CDK4 ne s'applique pas à son homologue CDK6, ce qui s'expliquait par l'absence d'une proline critique dans le domaine phosphoaccepteur (QMALTPVVVT dans CDK4 vs QMALTSVVVT dans CDK6). Ces données iniquaient que la ou les kinase (s) responsable(s) de la phosphorylation sur Thr172 de CDK4 devrai(en)t être dirigée(s) par la proline 173 uniquement présente dans la CDK4 (« proline-directed kinase(s) »).L'objectif principal de cette thèse est l'identification de kinase(s) impliquée(s) dans cette phosphorylation. Nous avons donc sélectionné une liste restreinte de « proline-directed kinases » (PDK) requises pour la prolifération cellulaire. Parmi celles-ci, les JNK, qui sont des PDKs, sont des interacteurs de p21 et CDK4 et peuvent avoir un rôle oncogène. De manière importante, nous avons observé que les JNKs, mais pas la CAK / CDK7, phosphorylaient in vitro la p21 et la CDK4 liée aux cyclines D. Les JNKs phosphorylaient également p21 sur ses trois sites P-T/S (Thr57, Ser130, Ser98). En mutant ces sites (T57A, S130A, S98A, T57A / S130A), nous avons montré que la phosphorylation de p21 par les JNKs n'est pas nécessaire pour la phosphorylation et l'activation de la CDK4 liée à p21. Par conséquent, in vitro les JNKs peuvent activer les complexes CDK4 liés à la p21, en agissant d’une part comme des kinases phosphorylant directement la CDK4 dans les complexes de cycline D-CDK4 stabilisés par la liaison de p21 et d’autre part en phosphorylant indépendamment des résidus de p21 impliqués dans l'activation de CDK4 dépendante de la CAK. Pour démontrer la relevance in vivo du rôle des JNKs comme kinases activatrices de la CDK4, nous avons analysé l'effet de leur inhibition dans les lignées de cellules tumorales T98G et MCF-7, les cellules MEF et des cellules CHO transfectées: dans tous ces cas, l'inhibition des JNKs, y compris l'inhibition spécifique de l'activité de JNK2 par une approche de génétique chimique en collaboration avec le groupe de Roger Davis, a réduit l'entrée du cycle cellulaire, et la phosphorylation et l'activation des complexes de cycline D1-CDK4. De manière intéressante, l’activation des complexes de cycline D3-CDK4 n’était pas affectée par l’inhibition des JNKs, apparemment parce que ces complexes étaient principalement associés à la p27 plutôt qu’à la p21. Mis ensemble, ces différents résultats nous amènent à proposer un nouveau modèle dans lequel différentes kinases activatrices de la CDK4, y compris les JNKs (indépendamment des phosphorylations de p21) et la CAK/CDK7 (de manière dépendante des phosphorylations de p21), coopèrent pour initier et maintenir l'activation de la CDK4 et générer la décision du cycle cellulaire. Cette nouvelle compréhension pourrait révéler de nouveaux mécanismes ciblables dans une perspective thérapeutique anti-cancéreuse.
Tumors are, at least in part, diseases of cell cycle regulation. The restriction (R) point is a fundamental point of the cell cycle in which mitogenic signaling cascades (including their oncogenic perversions) and cell metabolic status are integrated to commit the cell division cycle. CDK4 and CDK6 are the first CDKs to be activated in response to cell proliferation signals. By initiating the inactivating phosphorylation of the central oncosuppressor pRb, cyclin D-bound CDK4/6 play an essential role at the passage through R and thus in the cell multiplication decision, especially in most cancer cells in which CDK4 activity is highly deregulated. CDK4/6 inhibitory drugs are now evaluated in many clinical trials against most cancers, and the most advanced (Palbociclib-PD0332991) was approved in 2015 by FDA for treatment of metastatic breast cancers. Our group has identified the activating Thr172 phosphorylation as the highly regulated step that determines CDK4 activation. Whether CDK4 and CDK6 phosphorylations are catalyzed by the sole CAK (cyclin H-CDK7-Mat1) remains unclear. In analogue-sensitive CDK7 (as/as) mutant HCT116 cells in which CDK7 can be specifically inhibited, we participated to a study demonstrating a crucial CDK7 involvement in phosphorylation/activation of CDK4 and CDK6 and existence of non-CDK7 CDK4 activating kinase(s). Moreover, this study demonstrated that CDK7 activity was conditioned, at least in part, by p21 binding to CDK4, which increased in response to CDK7 inhibition. This coincided with disappearance of the most abundant phosphorylation of p21, which was localized (by 2D-gel electrophoresis analyses) at Ser130 and found to be catalyzed by both CDK4 and CDK2. Surprisingly, Ser130 p21 phosphorylation was not inhibited only by CDK7 inhibition, but also by Roscovitine and CR8 (CDK2 inhibitors) and Palbociclib. All together, these observations suggested that pRb inactivation and R passage are controlled by CDK7-dependent positive feedbacks mediated by p21 phosphorylation by CDK4 and CDK2 to sustain CDK4 activation. Importantly, these results confirm the hypothesis of a non-CDK7 CDK4 activating kinase(s). Our group has previously demonstrated that the regulation of CDK4 phosphorylation does not apply to its homologue CDK6, which was explained by the lack of a critical proline in the phospho-acceptor domain (QMALTPVVVT in CDK4 vs QMALTSVVVT in CDK6). These data have indicated that the activity of kinase(s) responsible for Thr172 phosphorylation of CDK4 should be directed by the unique proline 173 of CDK4 (proline-directed kinase(s)). The primary objective of this thesis is the identification of kinase(s) involved in this phosphorylation. We thus selected a shortlist of proline-directed kinases (PDKs) required for cell proliferation. Among them JNKs, which are PDKs, are interactors of p21 and CDK4 and can have an oncogenic role. Importantly, we observed that JNKs, but not CAK/CDK7, did phosphorylate CDK4 in vitro in their complexes with cyclins D stabilized by p21 binding. JNKs also phosphorylated p21 in the three P-T/S phosphorylation sites (Thr57, Ser130, Ser98). Mutating p21 phosphorylation sites (T57A,S130A,S98A,T57A/S130A) we also demonstrated that in vitro, the phosphorylation of p21 by JNKs is not required for the phosphorylation and activation of p21-bound CDK4. Therefore, in vitro JNKs might activate p21-bound CDK4 complexes by acting as a direct CDK4-activating kinases for cyclin D-CDK4 complexes stabilized by p21 binding and also by independently phosphorylating p21 residues involved in CAK-dependent activation of CDK4. To demonstrate the relevance of the role of JNKs as possible CDK4-activating kinases in vivo we analyzed the effect of their inhibition in T98G and MCF-7 tumor cell lines, MEFs and transfected CHO cells: in all these cases, inhibition of JNKs, including specific inhibition of JNK2 activity by a chemical genetic approach in collaboration with Roger Davis group, reduced the cell cycle entry and phosphorylation and activation of cyclin D1-CDK4 complexes. Interestingly, the activation of cyclin D3-CDK4 complexes was not affected by the JNK inhibition, apparently because these complexes were mainly associated with p27 instead of p21. Putting together all these results, we propose a new model in which different CDK4-activating kinases, including JNKs (independently of p21 phosphorylation) and CAK/CDK7 (dependently on p21 phosphorylation), cooperate to initiate and maintain the activation of CDK4 and generate the cell cycle decision. This new understanding may reveal new druggable mechanisms and anti-cancer therapeutic targets.