Résumé : Résumé:IntroductionLa chirurgie reste le seul traitement à visée curative pour les patients porteurs d’un cancer colorectal (CCR) primitif ou métastatique. L’établissement précis de l’extension de la maladie, au niveau de la tumeur primitive, des ganglions loco-régionaux et des métastases à distance représente un élément essentiel pour la prise en charge thérapeutique. Les ganglions locorégionaux et la technique du ganglion sentinellePour les patients présentant un CCR non métastatique, l’analyse pathologique des ganglions (pN) conditionne la décision d’administrer ou non une chimiothérapie adjuvante. Les patients présentant un envahissement ganglionnaire (pN+) recevront un traitement adjuvant, celui-ci n’étant le plus souvent pas indiqué chez les patients sans envahissement ganglionnaire (pN0). Près de 20 à 30% des patients classés pN0 vont cependant développer des récidives tumorales. Parmi ces patients, il est probable qu’une partie ait été sous-classée au moment du diagnostic. La technique du ganglion sentinelle (GS) permet d’identifier les ganglions les plus susceptibles d’être envahis et de réaliser des analyses anatomopathologiques plus approfondies sur un nombre plus limité d’échantillon. Cette technique est recommandée dans le cancer du sein et dans le mélanome, mais son rôle reste discuté dans le CCR. Le premier volet de cette thèse concerne les résultats d’études cliniques que nous avons menées pour évaluer le rôle de la technique du GS au bleu patenté (BP) et de l’imagerie en fluorescence (IF) au vert d’indocyanine ou indocyanine green (ICG) dans le staging ganglionnaire des patients présentant un CCR. Les principaux objectifs de ces travaux étaient d’évaluer la faisabilité de ces techniques et leur apport dans le staging des patients présentant un CCR.Notre première étude sur la technique du GS au BP, représentant la plus grande cohorte monocentrique européenne, a permis de démontrer la faisabilité de la technique. En outre, cette approche a modifié le geste chirurgical dans 12% des cas (technique in vivo) et a permis de reclasser 10% des patients initialement classés pN0 en pN+ par la réalisation de coupes sériées spécifiquement réalisées sur les ganglions démontrés comme GS. Dans une seconde étude sur la technique du GS comparant l’IF-ICG à la technique au BP, nous avons montré que ces 2 techniques étaient complémentaires, permettant d’augmenter la sensibilité globale pour la détection des métastases ganglionnaires. De plus, l’IF-ICG apparaît comme plus sensible chez les patients présentant une surcharge pondérale. En termes de sensibilité, la recherche du GS par IF est supérieure à la technique BP, ces résultats restant cependant limités, notamment en raison d’un taux élevé de faux négatifs (FN) pour les tumeurs localement avancées (pT3-4). Les métastases ganglionnaires et la carcinose péritonéaleDans le CCR, les patients métastatiques, présentant une carcinose péritonéale (CP) et/ou un envahissement ganglionnaire, ont un pronostic sombre. La chirurgie d’exérèse de la CP associée à une chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale (CHIP) et la réalisation de curages ganglionnaires chez les patients porteurs d’une maladie oligométastatique permettent toutefois d’obtenir des survies prolongées et parfois des guérisons, avec des résultats similaires à ceux observés chez les patients opérés pour métastases hépatiques isolées. Pour la CP, l’étendue de la maladie et la radicalité de la résection sont les principaux facteurs pronostiques de survie. La sensibilité des examens d’imagerie conventionnelle et métabolique reste cependant faible pour déterminer l’extension de la maladie péritonéale. L’évaluation de l’étendue de la CP et son exérèse sont donc essentiellement fondées sur la palpation et l’exploration visuelle réalisée durant l’intervention chirurgicale, représentant un facteur limitant pour la radicalité de la chirurgie. De façon similaire, chez les patients présentant une maladie métastatique ganglionnaire limitée, la détection peropératoire est souvent difficile, nécessitant la réalisation de curages étendus de principe, afin de s’assurer de l’exérèse des ganglions pathologiques.L’utilisation de l’IF après injection iv intra-opératoire d’ICG a été rapportée comme une technique permettant la détection de tissu tumoral tant visible que non visible (infraclinique), pouvant potentiellement aider le chirurgien et guider les gestes de résection. Aucune étude n’avait particulièrement analysé le rôle de l’IF-ICG dans la détection de CP et de métastases ganglionnaires de CCR. Le second volet de cette thèse concerne l’évaluation de l’apport de l’IF après injection iv d’ICG pour la détection de la CP et des métastases ganglionnaires dans le CCR. L’objectif primaire était de vérifier si les métastases péritonéales (MP) et ganglionnaires visibles par le chirurgien étaient effectivement détectées par l’IF-ICG peropératoire. En parallèle, nous avons évalué si l’IF-ICG permettait de détecter une maladie infraclinique, non détectée par le chirurgien dans les conditions habituelles. La première étude de cette seconde partie a permis de montrer que les MP étaient visualisées comme hyperfluorescentes à l’IF-ICG pour autant qu’elles ne soient pas d’origine mucineuse. De plus, l’IF-ICG a permis de détecter des MP non visualisées en lumière visible, permettant d’adapter le geste chirurgical et d’augmenter la radicalité de la résection dans près de 38% des cas. Dans une seconde étude, nous avons rapporté que la technique d’IF utilisée in vivo et ex vivo après injection iv d’ICG permettait d’identifier des ganglions métastatiques, détectés ou non par les imageries conventionnelles et métaboliques préopératoires. Les résultats de cette étude constituant une preuve de concept ont été ensuite confirmés dans une étude rétrospective réalisée sur l’analyse ex vivo des ganglions de patients ayant reçu une injection iv d’ICG. Dans ce travail, nous avons montré que les ganglions envahis étaient plus fluorescents que les ganglions non envahis. Toutefois, cette preuve de concept doit encore être confirmée et évaluée plus largement dans une étude prospective. Ces 2 travaux montrent donc le bénéfice potentiel de l’utilisation de l’IF après injection iv d’ICG à 2 niveaux, pour guider la chirurgie en améliorant la détection peropératoire des sites métastatiques infracliniques et pour guider l’analyse histologique, en identifiant des ganglions fluorescents sur la pièce de résection, permettant une étude anatomopathologique plus ciblée et plus approfondie. Conclusions et perspectivesNos travaux sur la recherche du GS dans le CCR par la technique au BP et à l’IF-ICG ont montré que ces techniques étaient faisables mais que leurs sensibilités restaient limitées, en particulier chez les patients porteurs de tumeurs localement avancées. Dans la CP d’origine colorectale, nous avons montré que l’IF-ICG permettait d’améliorer la stadification de la CP des patients opérés de métastases péritonéales non mucineuses, de révéler des lésions non visibles dans les conditions standards et d’améliorer la radicalité de la chirurgie. Pour la détection de ganglions métastatiques, nous avons montré que l’IF-ICG permettait, in vivo, de détecter des ganglions infracliniques durant l’intervention et ex vivo, de guider l’analyse anatomopathologique de la pièce de résection. Enfin, nous pensons que ces observations pourraient nous permettre d’élaborer un nouveau concept de GS systémique par opposition au GS classique correspondant aux ganglions de drainage anatomique de la tumeur. Nous proposons que les capacités particulières de rétention de l’ICG dans les tissus cancéreux après injection par voie systémique pourraient permettre d’identifier des sites ganglionnaires métastatiques en dehors des sites de drainage révélés par les injections de marqueurs au sein ou en périphérie de la tumeur elle-même. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons élaboré un nouveau protocole d’une étude clinique prospective dans laquelle la détection du GS systémique après injection iv d’ICG sera comparée aux résultats obtenus suite à l’injection péritumorale de BP. Les ganglions révélés par ces 2 techniques seront recherchés ex vivo sur la pièce de résection et analysés en anatomopathologie. Outre la démonstration de métastases ganglionnaires extra-anatomiques, nous pensons que cette approche systémique pourrait permettre de réduire le taux de FN observé suite à une injection péritumorale, notamment pour les tumeurs localement avancées, celles-ci pouvant perturber le drainage lymphatique selon les voies anatomiques. Summary:This thesis reports several clinical research works on the role of indocyanine green (ICG) fluorescence imaging (FI) for the detection of colorectal tumoral tissue. We first evaluate and compare the role of ICG-FI in the detection of sentinel lymph node (SLN) in colorectal cancer (CRC) in view to upstage patients. We have reported that both techniques (blue dye and ICG-FI) are similar in term of sensitivity with a high rate of false negative results. Therefore, we think that new approaches for SLN detection should be developped in CRC. Secondarily, we evaluate the role of ICG-FI after IV ICG injection for the detection of peritoneal carcinomatosis (PC) from CRC origin. We have reported that ICG-FI is able to detect non-mucinous PM with a sensitivity of 86%. Moreover, ICG-FI was able to guide surgery modifying the surgical procedure in 38% of patients. Thirdly, we investigate the role of ICG-FI for the detection lymph node (LN) metastases. We have reported that ICG-FI performed after IV ICG injection is able to detect LN metastases both in vivo and ex vivo. These findings have been confirmed in a retrospective study. Fiinally, we propose a new protocol to evaluate a new approach for SLN detection. In comparison with the standard technique using peritumoral injection, we propose a new approach using systemic (intravenous) ICG injection. We have called this approach the 'systemic' SLN detetion. This approach will be compared with the standard one using peritumoral blue dye injection. Sensitivity, specificity of both technique will be compared. In conclusion, the results of these preliminary clinical studies using ICG-FI for tumoral staging and treatment are encouraging and further larger studies should be performed.