Communication à un colloque
Résumé : Le bâtiment énergétiquement performant apparaît aujourd’hui comme une évidence, au niveau des pouvoirs publics à tout le moins. A Bruxelles, cette évidence a atteint son paroxysme avec une réglementation se référant aux exigences de la « construction passive » et présentée comme une « évolution naturelle ». En même temps, quatre ans durant, les porteurs de cette réglementation ont dû composer et ruser pour construire cette évidence dans l’espace public mais aussi dans l’arène politique. Et, non sans se contredire, ils n’ont pas manqué de souligner l’ampleur du changement de paradigme à l’œuvre, tout en saluant l’exemplarité de certains acteurs de terrain, en particulier d’architectes. De fait, le bâtiment énergétiquement performant n’est ni anodin, ni évident, en témoigne le développement critique dans le champ des sciences sociales. Pour contribuer à ce développement, tout en le croisant avec un regard d’architecte, je me suis intéressée aux normativités de l’institutionnalisation du bâtiment performant bruxellois en prenant appui sur la sociologie cognitive de l’action publique. Visant à en comprendre et à en questionner la portée transformative, ce travail s’inscrit dans une optique de décomposition de la solution « bâtiment énergétiquement performant », et plus largement « architecture durable », en s’attachant à sa signification plutôt qu’à son efficacité. Établi sous la forme d’une genèse des relations qui se nouent entre l’architecture, les idéologies et l’action publique, de l’industrialisation à nos jours, ce travail propose une lecture du bâtiment performant à partir de l’usage politique de l’architecture pour faire société. La performance énergétique n’y apparaît pas comme un objectif allant de soi, mais comme un référentiel qui, parmi d’autres et non sans dérives, participe à (re)définir l’architecture (durable) et qui transforme, parfois insidieusement, le rôle social alloué à l’architecte.