Résumé : Cette thèse de doctorat a pour objet l’étude de la céramique non tournée gallo-romaine des civitates tungrorum, nerviorum et remorum. La période prise en compte s’étend de la conquête de la Gaule par César (milieu du Ier siècle av. n. è.) au IVe siècle de n. è. Les problématiques traitées s’articulent autour des questions suivantes : qu’entendons-nous par céramique non tournée ? Quelles sont les formes constitutives du répertoire ? À quelle chronologie correspondent-elles ? Quelles sont les caractéristiques techniques de cette production ? De quel(s) processus de fabrication relève-t-elle ? Dans quel cadre cette céramique est-elle produite ? Émane-t-elle d’ateliers spécialisés ou s’agit-il d’une production dite « domestique » ? Afin de répondre à ces questions, dont les réponses sont le plus souvent intimement enchevêtrées, nous avons axé la méthodologie sur deux axes. Le premier consiste en une approche typo-chronologique : nous avons ainsi isolé près de 83 types de récipients se répartissant en pots, jattes, plats, bouteilles, cruches, coupelles et couvercles. Le second visait une tentative de reconstitution de la chaîne opératoire et posait également la question de l’applicabilité des méthodes ethnoarchéologiques au matériel gallo-romain. Cette seconde approche s’est limitée à l’étude d’une production particulière : la céramique non tournée « à dégraissant calcite », caractéristique du sud de la cité des Tongres et du nord de la cité des Rèmes. Ainsi en restant dans les limites strictes de ce que pouvait nous apprendre le matériel, nous avons pu éclairer quelques unes des étapes de la chaîne opératoire de cette production. Une analyse poussée des pâtes des récipients a permis d’éclairer la question de l’origine et de la provenance des matières premières que l’on peut situer aujourd’hui dans l’Entre-Sambre-et-Meuse (Synclinorium de Namur, Synclinorium de Dinant, Massif de Rocroi). L’examen des radiographies effectuées sur un échantillonnage d’une trentaine d’individus a permis de restituer des gestes et des séquences de gestes liés à l’ébauchage et à la mise en forme des récipients ; ces techniques et méthodes de façonnage montrent par ailleurs une certaine homogénéité. Les décors ont été répertoriés en terme d’outils et d’action de l’outil sur la surface et douze combinaisons ont ainsi été isolées. Enfin, rien n’a pu être dit au sujet de la cuisson des récipients pour deux raisons : premièrement, les études ethnoarchéologiques ont démontré que les tessons de céramique ne fournissent aucune information fiable concernant la cuisson ou les structures de cuisson ; deuxièmement, nous ne connaissons aucun atelier de production nous permettant d’aborder la question des structures de cuisson. En conclusion de cette thèse, nous insistons sur les apports potentiels d’une application systématique de l’étude de la chaîne opératoire des céramiques non tournées gallo-romaines à la connaissance de l’univers social de cette activité potière particulière.