Résumé : Cette thèse présente les réponses données à la question du fondement du possible et de l’impossible dans la scolastique jésuite espagnole de l’époque moderne : en vertu de quels critères jugeons-nous que telle chose ou tel événement sont possibles, alors que tels autres nous paraissent impossibles ou contradictoires ? La double nature de ce travail, philosophique et historique, s’incarne dès lors en deux volumes à la fois distincts et complémentaires. Le premier volume est consacré à l’analyse philosophique des différentes réponses apportées au problème du possible, entre les premiers pas académiques de la Compagnie de Jésus espagnole jusqu’à son expulsion définitive du royaume en 1767. Après quelques préliminaires généraux sur le développement institutionnel et doctrinal de la scolastique moderne, on y présente successivement les solutions des écoles dominicaine et franciscaine espagnoles du XVIe siècle avant de passer aux différents grands modèles jésuites : les synthèses de Gabriel Vázquez et Francisco Suárez ; l’émergence d’un courant ultra-essentialiste ; la critique inspirée par le nominalisme de Pedro Hurtado de Mendoza ; le développement d’une ontologie conditionnaliste par Juan de Lugo et ses nombreux élèves ; la critique néo-augustinienne de toutes les traditions antérieures par Antonio Pérez et ses nombreux élèves ; le développement d’une ontologie des états de choses par Sebastián Izquierdo ; et enfin le développement d’une série d’autres solutions marginales à la fin du XVIIe siècle. Le travail se clôture sur l’expulsion d’Espagne de la Compagnie de Jésus en 1767 et par quelques réflexions sur la « migration » de ces problématiques vers l’Europe Centrale.

Le second volume est quant à lui purement historique et textuel. Il propose l’édition de différents textes, tirés d’ouvrages imprimés anciens ou bien de manuscrits inédits, rédigés par vingt des principaux auteurs engagés dans la querelle des possibles, à savoir, dans l’ordre chronologique : F. Albertini, P. Hurtado de Mendoza, J. de Lugo, R. de Arriaga, Th. Compton Carleton, A. Pérez, F. de Oviedo, M. de Elizalde, T. González de Santalla, T. Muniesa, S. Mauro, S. Izquierdo, G. de Ribadeneira, I.F. Peinado, J. de Sousa, A. Sémery, J. de Campoverde, E. Láriz, Á. Cienfuegos et J. Rufo. Chaque édition de texte est précédée d’une biographie intellectuelle retraçant les principales étapes de la carrière de l’auteur, avec des indications sur ses maîtres, collègues et disciples, ainsi que sur le contexte institutionnel de son enseignement. L’ensemble est précédé d’une étude sur les rapports entre les cours imprimés et manuscrits dans la tradition scolastique moderne.

Un troisième et court volume se compose d’un bref « who’s who » scolastique ainsi que d’une bibliographie générale, reprenant toutes les sources primaires et secondaires utilisées.