Résumé : Introduction

La mortalité maternelle reste encore élevée dans les pays en développement notamment en Afrique où une femme parmi 16 en âge de reproduction sera touchée par cette mortalité contre 1 femme parmi 2400 dans les pays développés. Au Burkina Faso, ce risque de mortalité est de 1 parmi 12 pour une femme en âge de reproduction.

La littérature internationale montre qu’un meilleur accès aux soins qualifiés à l’accouchement et aux soins obstétricaux d’urgence est la solution majeure pour sauver la vie d’une femme au cours de la grossesse, de l’accouchement et dans le post partum. Elle montre que cet accès est limité en milieu rural par l’existence de barrières liées aux services de santé, de barrières économiques et sociales. Au milieu des années 1990, il a été montré qu’il serait possible d’améliorer l’accès des femmes aux soins qualifiés et aux soins d’urgence par des interventions locales visant à réduire ces barrières. Ces résultats ont entraîné la mise en place de plusieurs interventions en milieu rural burkinabè. L’objectif de cette thèse est d’examiner les activités mises en place au niveau du système de santé dans les districts ruraux de Houndé et d’Orodara au Burkina Faso afin de mieux comprendre ce qui a été à la base de l’évolution des indicateurs de santé maternelle.

Méthodologie

Le travail a combiné des méthodes quantitatives et qualitatives. Des études de cas, plusieurs sources d’informations (revue des documents, interview des populations, prise de notes, observation participante) ont été utilisées pour identifier au niveau du système de santé des districts les activités pouvant influencer l’utilisation des soins obstétricaux d’urgence et analyser la dynamique et la qualité de leur mise en œuvre. Des approches quantitatives (étude écologique, analyse transversale, étude avant et après) ont permis d’étudier l’évolution des indicateurs et de mettre celles-ci en parallèle avec la réalisation de certaines activités. Enfin, les résultats dans les deux districts ont été comparés avec ceux d’autres districts ayant aussi bénéficié d’une intervention en santé maternelle.

Résultats

L’analyse du système de santé a identifié l’existence d’activités d’éducation et de mobilisation des populations, d’amélioration de l’environnement de la prise en charge de la femme enceinte et de renforcement de compétence des agents de santé et des accoucheuses villageoises dans les deux districts. Dans le district de Houndé une intervention bien structurée (le projet SAREDO) avec analyse des besoins a été à la base d’une grande partie des activités de 2000 à 2003. Mais l’analyse de la mise en oeuvre des activités de ce projet a montré des écarts par rapport à ce qui avait été planifié, des retards et un manque de suivi des activités. Ces faiblesses du projet étaient liées à l’approche participative de mise en œuvre, à des faiblesses organisationnelles et à l’arrêt avant terme du financement. Dans le district d’Orodara, la mise en place des activités a démarré avec l’arrivée en 2001 d’un médecin chef en provenance du district de Houndé. Aucune intervention planifiée n’a existé. Les activités ont été mises en place à partir de décisions empiriques s’inspirant de l’expérience du projet SAREDO à Houndé. Dans les deux districts, la collaboration avec des intervenants dans et hors du district, le leadership de l’équipe de district et l’utilisation rationnelle des ressources ont été déterminants dans la mise en œuvre des activités.

L’évolution des indicateurs de soins maternels a montré une amélioration de l’utilisation des soins maternels en général de 1999 à 2006 dans les deux districts. En 2004, si l’utilisation des services de consultation prénatale et de maternité pour l’accouchement était meilleure à Houndé qu’à Orodara, il n’existait aucune différence pour ce qui était du taux des accouchements par césarienne. Pour ce dernier indicateur, on notait une croissance linéaire dans le district de Houndé, tandis qu’à Orodara, le taux était resté stable de 1999 à 2002 et à partir de 2003 on assistait à une amélioration avec un taux atteignant celui de Houndé en 2005. La mise en parallèle de l’évolution du taux d’accouchements par césarienne et du calendrier des activités dans les deux districts montre une amélioration après la mise en place du renforcement de la qualité des soins (formation des agents et équipement) et de la réduction du coût des soins d’urgence surtout dans le district d’Orodara. Ces observations suggèrent l’existence d’une relation entre l’évolution du taux des accouchements par césarienne et, d’une part, le renforcement de la qualité des soins et d’autre part, la mise en place de la réduction du coût des soins d’urgence.

Une évaluation a relevé dans le district de Houndé que l’offre de soins était meilleure après la formation des agents de santé et l’équipement des services. Elle a aussi montré une meilleure utilisation des services de base (consultation prénatale et accouchements institutionnels) et un taux plus élevé d’évacuations obstétricales dans le groupe des centres de santé avec un responsable de la maternité ayant bénéficié de la formation que dans le groupe des centres de santé avec un agent non formé responsable de la maternité. Les proportions d’accouchements par césarienne et d’interventions obstétricales majeures réalisées pour sauver la vie de la mère étaient plus élevées dans le groupe des centres de santé avec un agent formé responsable de la maternité mais les différences n’étaient pas statistiquement significatives. Les résultats de cette évaluation montrent qu’au niveau des centres de santé de base, former les agents et équiper les services permettent d’améliorer la qualité et l’utilisation des services de base mais ne suffisent pas pour améliorer l’utilisation des soins obstétricaux d’urgence.

Au niveau de l’hôpital du district d’Orodara, après la mise en place des kits opératoires, les proportions des évacuations obstétricales à l’admission, des évacuations obstétricales prises en charge et des accouchements par césarienne à l’hôpital du district se sont améliorés significativement tandis que les proportions des complications infectieuses post césarienne et des évacuations obstétricales à l’hôpital de référence, et le coût des soins d’urgence ont été réduits. Ceci montre qu’en réduisant le coût des soins via les kits opératoires et en plus d’une formation des agents de santé, on a pu améliorer l’accès et la qualité des soins obstétricaux d’urgence dans cet hôpital.

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