Thèse de doctorat
Résumé : L'objectif principal de cette thèse est d'étudier les mécanismes sous-jacents de la transition entre le traitement visuel conscient et inconscient. Il est maintenant largement accepté dans le domaine de la psychologie cognitive qu'au moins certains processus peuvent se dérouler de manière inconsciente. La perception visuelle est le champ le plus étudié à ce sujet. Bien que nous ayons l'impression d’avoir une vision complète, détaillée et continue du monde extérieur, il a été démontré que certaines parties de ce flux visuel ne sont pas consciemment perçues, par exemple en raison du fait qu'elles ont été présentées très rapidement ou en raison du fait que notre attention avait été détournée par un autre stimulus.

Le problème majeur dans l'étude scientifique de ces perceptions (in)conscientes, est que l'on doit se baser sur des mesures subjectives. En effet, seul l’observateur lui-même est capable de rapporter son expérience visuelle, et ce qu’il perçoit ne peut jamais être vérifié de manière objective par l'expérimentateur. En d'autres termes, il n'y a pas de variable directement mesurable de la conscience perceptuelle, ce qui force les expérimentateurs à utiliser des données observables objectivement (des données « à la troisième personne »). Se baser sur les rapports introspectifs est difficile car il s’agit d’une information qualitative et qui n’est pas fiable en raison de son caractère subjectif. Par conséquent, il a longtemps été considéré comme impossible d'étudier scientifiquement la conscience. Cependant, de nombreux développements, tant dans la pensée que dans les avancées méthodologiques, ont contribué à l'étude de la conscience en psychologie expérimentale.

Descartes [17], en introduisant une distinction entre le corps et l'esprit, a paradoxalement rendu possible l'étude scientifique du cerveau, celui-ci étant considéré comme faisant partie du corps. Cependant, la pensée (consciente) était considérée comme faisant partie de l'esprit, un substrat non-physique dont l’étude scientifique est impossible. C'est la principale raison pour laquelle, pendant longtemps, la conscience a été un sujet réservé exclusivement à la réflexion philosophique. Ce n'est qu’au cours du 19ème siècle que les premiers psychologues expérimentaux ont fait valoir l’idée selon laquelle les processus psychologiques pourraient être mesurés, et que la psychologie est devenue une discipline scientifique. Toutefois, au cours du 20ème siècle, les comportementalistes évitent la «conscience». Le comportement observable était alors considéré comme fournissant des données précieuses et étudier la conscience faisait appel à des méthodes introspectives considérées comme non fiables. Cependant, plus tard, les développements scientifiques ont radicalement changé cette idée. Par exemple, le gestaltisme a montré dans les illusions visuelles, que la conscience subjective est une variable qui peut être manipulée. De plus, la théorie de l'information [20,21] a proposé une métaphore du cerveau humain comme un système de traitement de l'information par analogie à un système informatique. Des expériences sur la "mémoire de travail" étaient alors très semblables à ce que nous appellerions aujourd’hui des études sur la conscience. En outre, certaines expériences ont démontré un traitement inconscient (par exemple, Marcel [3]) et la théorie de Détection du Signal [26] a fourni un moyen de quantifier les rapports de conscience. Enfin, des études de neuro-imagerie ont révélé que le traitement de l'information inconscient est accompagné par des processus cérébraux observables et démontre ainsi que les mécanismes neuronaux sous-jacents de traitement de l'information inconscient dans le cerveau peuvent être comparés à des mécanismes observés dans le traitement conscient. Cette approche à aujourd’hui mis à jour de nombreux candidats pour ce que l’on appelle le « corrélat neuronal de la conscience » (le «Neural Correlate of Consciousness» [6,29]).

En résumé, ces développements récents ont stimulé l’investigation expérimentale ainsi que de la pensée théorique sur la conscience. Il existe aujourd’hui de nombreuses théories de la conscience. Certaines sont inspirées de la philosophie et d'autres sont d’avantage basées sur l’analyse des mécanismes neuronaux sous-jacents. Dans l'introduction de cette thèse, nous ne discutons que les théories qui forment la base pour la construction de nos études. Nous empruntons la taxonomie de Block [34] pour organiser la multitude de théories. Nous survolons rapidement les théories biologiques, les théories du type « Espace de travail global » (Global Workspace Theory), et les théories d'ordre supérieur.

Dans la perspective biologique, la conscience est définie par un état biologique du cerveau. Lamme [38], par exemple, suggère que le traitement récurrent dans le cerveau est l'élément déterminant des processus conscients. Si le traitement est limité aux connexions « feedforward », il peut influencer le traitement mais n'est pas considéré comme conscient. Si des connexions récurrentes sont impliquées dans le flux de traitement, le traitement est défini comme une perception consciente. Même si ce traitement récurrent est très local (par exemple limité au cortex visuel), les participants sont considérés comme étant conscients du stimulus. Selon Lamme [38], cette définition de la conscience s'applique même lorsque les sujets nient faire l’expérience consciente du stimulus.. Il s’agit d’une théorie très controversée, car elle définit la conscience en fonction d'un mécanisme neuronal et ne laisse aucune place aux rapports subjectifs.

La théorie de l’espace de travail global (GWT), par contre, met l’accent sur l’importance des rapports subjectifs. Dans cette théorie, la conscience est expliquée par la métaphore du théâtre [54]. Une représentation théâtrale combine des événements qui ont lieu sur scène en présence d’un public, tout comme la conscience implique des informations limitées qui rendent possibles l'accès à un grand nombre de sources inconscientes de la connaissance» [358]. Dehaene et ses collègues [55,61,334] ont étendu cette idée et ont proposé que la signature neuronale de cet espace de travail est une ignition brusque d’activation généralisée du cortex pariéto-frontal. En outre, ils distinguent quatre niveaux de conscience, basés sur deux dimensions: la force des stimuli (bottom-up) et l’attention (top-down). Si les deux dimensions sont élevées, un stimulus est consciemment traité. Si une seule de ces dimensions est élevée, le stimulus est traité inconsciemment (subliminal ou préconscient). Si les deux dimensions sont faibles, les stimuli n’ont (presque) aucun effet sur le traitement. Seulement dans le cas du traitement conscient, il y a donc activation qui s’étend à la région pariéto-frontale, c’est-à-dire l'espace de travail.

Dans une troisième théorie, « higher-order thought theory » (HOT) [69,70], inspirée de la philosophie, l'intuition est suivi que la conscience exige une pensée à l'effet que nous sommes dans un état d’avoir une certaine perception. Par exemple, lorsque je dis que j’ai une perception consciente de la couleur rouge, je veux dire que je pense à moi étant dans un état de percevoir rouge. En général, selon cette théorie, les états de conscience sont des états mentaux dont nous sommes conscients. Cette théorie traite donc particulièrement de l'aspect phénoménal de la conscience (c’est-à-dire ce que c'est que d'être dans un état de conscience).

Ces deux derniers types de théories ont considérablement contribué à l’élaboration de la thèse de la plasticité radicale [7,93]. Cette dernière constitue le point de départ des études dans la présente thèse de doctorat. Elle sera donc largement décrite tout au long de ce travail de thèse.

La thèse de la plasticité radicale [7,93] est une vue dynamique sur la conscience, en précisant que le cerveau s'adapte en continu à travers l'apprentissage de ses propres signaux internes en les re-décrivant. Ce processus de rediscription correspond à la formation de méta-représentations de la théorie de la pensée d'ordre supérieur. La combinaison de plusieurs de ces méta-représentations augmente la disponibilité de la conscience et correspond à une diffusion globale dans la théorie de l'espace de travail global.

En outre, la thèse de la plasticité radicale [7,93] stipule que la disponibilité de la conscience dépend de la qualité de la représentation, qui à son tour, dépend de trois dimensions: la force, la distinctivité et la stabilité. Une représentation solide, stable et distincte est plus susceptible d'être disponible pour le traitement conscient. Par exemple, l'augmentation de la durée de la présentation d'un stimulus (la force) augmente la qualité de la représentation de ce stimulus et augmente donc la disponibilité à la conscience.

Enfin, la relation entre la qualité de la représentation et la disponibilité à la conscience n'est pas une relation une-à-une, mais évolue en trois phases: la phase de cognition implicite, la phase de la cognition explicite et la phase d'automaticité.

Tout d'abord, au stade de la cognition implicite, il concerne une expérience phénoménale très vague. Le contrôle intentionnel et la conscience d'accès sont faibles, ce qui implique qu’on ne peut pas contrôler l'effet d'un stimulus sur le comportement et qu’on ne peut pas verbaliser l'identité du stimulus. Il s’agit de l'étape du traitement inconscient. Par exemple, dans les expériences d'apprentissage de grammaires artificielles [94], les participants sont exposés à des chaînes de lettres ou de mots qui suivent des règles complexes. Après une phase d’exposition, les participants doivent indiquer si de nouvelles chaînes obéissent à ces règles ou non, ce qui indique qu'ils ont appris le matériel avec succès. Toutefois, ils ne sont pas capables de verbaliser ces règles. Cela suggère qu'ils ont appris le matériel de manière inconsciente, ou du moins implicite. Dans un paradigme lié, l'apprentissage de séquences [102], il a en outre observé que les participants ne pouvaient pas inhiber l’utilisation d’une séquence difficile qui a été appris au cours du temps. En d'autres termes, ils ne peuvent pas contrôler l'information acquise et en plus de cela, ils ne pouvaient pas le rapporter. Pourtant, l'information a été traitée, comme démontré par des temps de réaction plus rapides lorsque le matériel suit la séquence que lorsqu’il suit une séquence aléatoire. Cela suggère encore une fois que l'apprentissage inconscient est possible. La recherche sur le conditionnement (par exemple, [109,113,118]) révèle également des effets inconscients. Même lorsque les participants ne sont pas conscients de l'association entre deux stimuli ou entre un stimulus et une réponse, leur comportement est influencé par l'association. Cependant, ce domaine de recherche est moins contingent sur les résultats obtenus et d’autres chercheurs critiquent [129] les mesures de conscience utilisées dans ces paradigmes. Un troisième axe de recherche pertinent concerne des paradigmes d'amorçage subliminal. Dans un paradigme d'amorçage subliminal, les stimuli sont présentés pour une très courte durée et ensuite masqués (c’est-à-dire les amorces). Cela les rend invisibles et ils ne sont donc pas traités consciemment. Elles sont cependant traitées inconsciemment, ce qui est démontré par l'effet qu'ils exercent sur le comportement des stimuli ultérieurs (c’est-à-dire les cibles). Beaucoup de ces effets ont été observés, même au niveau des influences sémantiques [135,136,137]. Par exemple, si le mot "médecin" présenté de manière subliminale est suivi par un mot sémantiquement lié tel qu’«infirmière», les participants réagissent plus vite que lorsqu’il est suivi par un mot sans rapport, tel qu’«arbre». En somme, plusieurs paradigmes ont examiné la possibilité que le traitement inconscient (ou implicite) est possible. Dans ces paradigmes, le traitement inconscient est souvent comparé au traitement conscient (ou traitement explicite), qui est la deuxième étape dans notre cadre de la qualité de représentation.

Dans la deuxième étape, les représentations ont accumulé une qualité suffisante pour être à la disposition de l'accès conscient. Ce sont ces contenus, dont nous sommes conscients, par exemple lorsque nous effectuons une multiplication difficile. Elle concerne principalement l'attention lors de tâches exigeantes et le stade est caractérisé par un contrôle flexible. Parce que la conscience est généralement considérée comme le mode par défaut dans lequel nous nous trouvons, les études décrivent souvent cette étape par opposition avec la précédente, le stade inconscient [2]. En effet, de nombreuses différences ont été observées entre le traitement conscient et inconscient. Ces différences indiquent que la conscience est nécessaire pour le control adaptative [1], pour tenir compte du contexte [176], pour enchaîner les opérations mentales [173], pour l’inhibition [167], ... Au contraire, d'autres expériences démontrent que certains de ces processus ne se limitent pas au traitement conscient. Par exemple, des indices no-go présentés de manière subliminale pourraient induire de l’inhibition [181]. Il est donc loin d'être clair si on peut dire que la fonction de la conscience est d'offrir un contrôle souple et du comportement adaptatif. Ces incohérences nous amènent à supposer que le flux entre les étapes est graduel. Pour cette raison, dans nos études, nous avons manipulé graduellement les variables indépendantes .

Enfin, la troisième étape de l'automaticité est caractérisée par un comportement bien formé, par exemple comme jouer du piano chez les pianistes experts. La recherche sur les effets de l'expertise démontre que le traitement est en effet très différent pour les experts que pour les novices. Par exemple, la catégorisation au niveau sous-ordonné (par exemple, Bulldog, Schnauzer, ...) est plus difficile que la catégorisation à un niveau de base (par exemple, chien contre chat). Chez les experts en races de chiens, ces performances de catégorisation peuvent atteindre le même niveau [191,192]. Nous défendons l’idée selon laquelle la fonction de l'expertise est de rendre automatique le traitement des objets d ‘expertise. Dans l'exemple, l'expert en races de chiens peut catégoriser automatiquement les différentes sortes de chiens. Au stade de l'automaticité, les représentations sont très disponibles pour l'action, ce qui se traduit par de bonnes performances. D'autre part, le contrôle est faible, en raison du caractère balistique de ces processus [224]. Une fois lancés, ils ne peuvent pas – ou difficilement - être arrêtés. En outre, ces processus peuvent éventuellement être disponibles à la conscience phénoménale. En effet, la fonction de ces processus automatiques est l’efficacité. Ils ne nécessitent pas d'attention, et peuvent ainsi se concentrer ailleurs. Normalement, ces processus ne sont donc pas conscients à mesure qu'ils progressent, mais attirer l'attention sur ces processus peut les rendre disponibles. Par exemple, lorsque vous conduisez une voiture, on n'est généralement pas conscient des mouvements d’embrayage, mais on pourrait se concentrer sur ces derniers en cas de besoin. Ainsi, les processus automatiques ne sont pas nécessairement des processus inconscients. Au contraire, la conscience y est facultative.

La transition entre les trois stades qui ont été décrits doit être considérée comme une transition progressive. Surtout, cette transition dépend de la qualité des représentations. Dans les études dans cette thèse de doctorat, nous avons manipulé la qualité de la représentation afin d'explorer la transition entre la phase inconsciente (implicite) et le stade conscient (explicite). Ces manipulations sont supposés influencer la qualité de la représentation en deux directions: bottom-up et top-down.

Nous avons défini les facteurs bottom-up comme des facteurs propres à la stimulation externe, tandis que les facteurs top-down sont propres au cerveau des sujets. Ceci est cohérent avec la définition de l' « input » et « priors » (des connaissances à priori), dans le cadre de l'inférence bayésienne [228,229]. Les dimensions de la qualité de la représentation (la force, la stabilité et le caractère distinctif) peuvent ainsi être manipulés par des facteurs bottom-up et top-down.

Nous présentons cinq études dans cette thèse qui étudient l'influence de ces facteurs bottom-up et top-down dans un paradigme de la perception subliminale. De nombreuses études ont porté sur un facteur particulier bottom-up: la force du stimulus. Par exemple, dans l’étude de Del Cul et al. [231], l'augmentation de l'intervalle de temps entre un stimulus et le masque subséquent, provoquait une augmentation de l’accès à la conscience, qui suivait une fonction sigmoïde. Cependant, la forme exacte de la courbe est un sujet de débat: certains la considèrent comme un phénomène de tout-ou-rien [60,231], tandis que d'autres la considèrent plutôt comme un continuum [7,233].

Dans l'étude 1, nous avons exploré la forme de ces courbes en faisant varier la durée des amorces dans un paradigme d'amorçage subliminal. Tout d'abord, plusieurs blocs d'amorçage ont été présentés aux participants dans lesquels la durée de l’amorce a augmenté dans chaque bloc. Au cours de cette tâche, les participants devaient classer les cibles et n'ont pas été informés de la présence des amorces. Ensuite, nous avons mesuré la conscience de l’amorce au moyen de la même quantité de blocs avec les mêmes durées premiers croissants. Cette fois-ci, les participants ont été informés de la présence des amorces et ont été invités à les classer. Ceci est un test de conscience objectif typique, basée sur la mesure « d prime » (d’) de Signal théorie de détection [26]. Cette étude nous a permis d'explorer la dynamique de la perception inconsciente et consciente en fonction de la durée de l’amorce.

Comme prévu, nous avons observé une augmentation des effets d'amorçage et de conscience en fonction de la durée d’amorce. Les formes des courbes étaient plutôt concave pour les effets d'amorçage et sigmoïde pour la conscience. Cela indique que les mécanismes sous-jacents de l'amorçage et de la conscience sont au moins en partie dissociables. En outre, les courbes des effets d'amorçage différaient significativement de zéro pendant une durée de l ‘amorce plus courte que les courbes de conscience. Cela confirme l'existence d'effets d'amorçage inconscients, qui ont déjà été démontrés dans la littérature [3,133,148]. Cependant, nous avons observé que ces effets d'amorçage inconscients ne se sont produites qu’à des durées cruciales de l’amorce, ce qui indique que ces effets inconscients sont difficiles à observer si la durée l’amorce n'est pas manipulée avec soin. Enfin, le test de conscience a indiqué que les réponses à ce dernier étaient influencées par l'identité de la cible, en dépit de l'instruction de l’ignorer. Cela amène à s'interroger sur la validité de ces tests de conscience objectives dans l'étude 2.

Dans l'étude 2, nous avons à nouveau utilisé un paradigme d'amorçage subliminal et exploré les effets d'amorçage et de conscience. Cependant, cette fois le but de l'étude était d'examiner plusieurs facteurs qui pourraient influer la mesure de la conscience, afin de tester la validité de cette mesure. Par conséquent, nous avons présenté plusieurs tests de conscience légèrement différents aux participants. Nous avons manipulé trois facteurs. Tout d'abord, nous avons examiné s’il y avait une influence de la présentation de la cible sur la conscience des amorces. Lors de ce mesure de conscience, nous avons présenté une cible qui pouvait être soit directionnelle, soit neutre. Nous avons supposé que la cible directionnelle nuirait à la visibilité des amorces par rapport à la présentation d'une cible neutre, puisque la cible directionnelle pourrait interférer avec le traitement de l’amorce. Afin de tester autre facteur susceptible d’influer sur la mesure de la conscience, nous avons introduit un retard entre la cible et la réponse. Nous avons supposé que cela augmenterait la conscience, car il faut du temps pour prendre conscience d'un stimulus. Enfin, un troisième facteur a été testé en manipulant l’attention top-down. Ici, dans une condition, l'attention pouvait être entièrement attribuée à l'amorce, alors que dans une autre condition, l’attention était partagée entre l’amorce et la cible. Nous avons supposé qu'une attention accrue devrait conduire à une conscience accrue des amorces.

Les trois hypothèses ont été confirmées: une cible neutre, l’attention focalisée et un retard entre la cible et la réponse ont tous trois eu pour effet d’augmenter la conscience. Cela implique que l’utilisation du d’entant mesure, souvent utilisée dans la recherche de la conscience, peut être une sous- ou une surestimation de la prise de conscience réelle. Cette situation est problématique, surtout dans le cas de sous-estimation, parce que les effets inconscients sur le comportement pourraient être attribués à un traitement conscient minime. Par conséquent, nous avons utilisé une mesure subjective de la conscience dans les études suivantes. Nous avons choisi d'utiliser une échelle PAS (Perceptual Awareness Scale) [246], ce qui remet en question la visibilité phénoménale de stimuli. Les participants devaient évaluer cette visibilité sur une échelle de 4 points, notamment: 1) aucune expérience, 2) bref aperçu, 3) une expérience presque clair et 4) expérience claire du stimulus. Toutefois, d'autres questions peuvent être posées sur des mesures subjectives. Tout d'abord, la validité des mesures subjectives pourrait souffrir du syndrome du « underconfidence" [160], à savoir le fait que les participants ont tendance à sous-estimer leur conscience. Deuxièmement, il est difficile de savoir comment mettre en évidence les effets inconscients à l'aide de ces mesures, car il n’est pas clair qu’une réponse telle que "bref aperçu » indique un traitement conscient ou inconscient. Par conséquent au lieu de remplacer la mesure objective par la mesure subjective, nous avons utilisé les deux en même temps. Une telle approche à plusieurs volets est, à notre avis, la meilleure solution que nous avons pour le moment.

Dans l'étude 3, suivant le même ordre d’idées que dans l'étude 1, nous avons manipulé le nombre de répétitions d'un stimulus masqué afin d'explorer l'effet de la stabilité du stimulus. Nous avons de nouveau supposé que l'augmentation de la stabilité des stimuli augmenterait la disponibilité à la conscience. Ceci est en contraste avec d'autres études réalisées par Marcel et par Wentura et Frings [3,262]. Ces auteurs ont observé que la répétition d'une amorce masquée augmentait les effets d'amorçage, mais pas la conscience. Cependant, nous pensons que l'amélioration de la méthodologie pourrait apporter un nouvel éclairage sur ce point. Nous avons testé les effets d’amorçage et la conscience dans un design mixte, où les participants devaient classer la cible sur la moitié des essais et effectuer un test de conscience objective et subjective sur l'autre moitié des essais. Surtout, nous avons observé que les effets d’amorçage et la conscience augmentaient en fonction de la stabilité de l’amorce. Nous interprétons ces résultats dans une perspective de qualité de la représentation et défendons l’idée selon laquelle la répétition d'un stimulus augmente la qualité de sa représentation et a donc une plus grande probabilité d'être accessible à la conscience. De plus, nous n'avons pas observé des effets d'amorçage inconscients dans cette étude. Une conscience significative a été observée pour moins de répétitions de l’amorce que des effets d'amorçage significatifs. Ainsi, les effets d'amorçage ont été trouvés uniquement lorsque les participants étaient conscients des stimuli. Cela confirme notre idée première, selon laquelle les effets inconscients sont difficiles à trouver et dépendent de paramètres spécifiques de la tâche à accomplir. Enfin, les participants ont utilisé toutes les réponses de l’échelle PAS (bien que les réponses «expérience claire» étaient rares), ce qui suggère que l'expérience de ces stimuli n'était pas un phénomène de tout-ou-rien, et soutient ainsi notre point de vue de la conscience comme étant progressive.

Dans l'étude 4, nous avons étudié l'effet top-down de l'expertise sur la conscience. L’une des principales prédictions de la thèse de la plasticité radicale est que la conscience dépend de l'apprentissage. Un apprentissage approfondi aboutît à l’expertise et, par conséquent, l'expertise devrait accroître la conscience, au moins lorsque les participants sont invités à rapporter cette prise de conscience. Conformément à nos autres études, nous avons utilisé un paradigme de perception subliminale, mais cette fois sans amorçage. Nous avons comparé des participants chinois et européens dans leur reconnaissance (test de conscience objectif) et visibilité (test de conscience subjectif) de caractères chinois et de symboles mayas. L'hypothèse était que les participants chinois auraient une meilleure performance lors de la reconnaissance et une visibilité accrue pour les caractères chinois. C'est exactement ce que nous avons observé, confirmant ainsi l'idée selon laquelle l'expertise augmente la disponibilité de conscience pour les objets d'expertise.

L’étude 5 est étroitement liée à l'étude 4 et a été construite dans le but de contrôler la situation d'apprentissage. Des participants non-experts ont été formés sur un ensemble de stimuli et nous avons comparé leur performance en reconnaissance ainsi que les rapports de conscience avant et après la formation. Dans trois expériences, l'intensité de l'apprentissage a été augmentée, en raison de l’absence des effets d'entraînement. Dans la troisième expérience, un effet d'entraînement général pouvait être démontré, après neuf jours de formation consécutifs. Cependant, l'effet ne se limitait pas aux stimuli sur lesquels les participants ont été formés, mais était généralisé aux stimuli de contrôle également. Nous avons observé cet effet général uniquement sur la performance au test de reconnaissance (test de conscience objective). En revanche, les rapports de conscience subjectifs ont montré un effet d'apprentissage spécifique, avec une visibilité accrue limitée à l'ensemble de stimuli appris. Nous supposons que ce dernier est un artefact induit par les choix de réponse qui ont été présentés lors du test de reconnaissance précédent. Cela signifie que la conscience plus élevée a été signalée lorsque les options de réponse ont fait partie de l’ensemble des stimuli appris que lorsque les options de réponse ont fait partie de l'ensemble non apprise. En somme, les expériences dans l'étude 5 suggèrent que l'apprentissage doit être suffisamment étendu pour induire des effets sur la conscience. Peut-être seulement une réelle expertise, et non un simple apprentissage associatif, peut avoir un impact sur la disponibilité à la conscience.

En somme, les manipulations bottom-up ont démontré des effets clairs sur la disponibilité à la conscience, tandis que les manipulations top-down de l'apprentissage et de l'expertise sont moins claires. On pourrait imaginer qu’un certain degré d'apprentissage est nécessaire afin d'augmenter la disponibilité à la conscience, et que ce dernier coïncide avec le degré d'apprentissage nécessaire pour que les effets de l'expertise se produisent.

Dans la discussion générale, nous avons formulé ces résultats non seulement dans la thèse de plasticité radicale, mais également par rapport à d’autres théories existantes de la conscience. Nous reprenons les trois sortes de théories qui ont été proposées par le Block [34] et ont mis en évidence la façon dont nos études s'insèrent dans les prédictions faites par ces théories.

Dans le cadre biologique, et plus particulièrement selon la théorie de Lamme [38], les facteurs bottom-up que nous avons manipulé sont supposés influencer la probabilité de la survenance d'un traitement récurrent dans le cerveau. En ce sens, nos résultats n’infirment pas cette théorie. Cependant, le traitement récurrent est censé être tout ou rien, alors que nous avons observé des rapports de conscience intermédiaires. On ne sait pas comment l'expertise pourrait influencer l'apparition de connexions récurrentes. L’expertise est-elle un facteur favorable, similaire à l'attention? Ou est-ce l’apprentissage qui contribue à la formation de ces connexions? Il n’y a actuellement pas d’hypothèses spécifiques concernant les effets de l'apprentissage selon cette théorie ou d'autres théories partageant les idées du cadre biologique.

Ensuite, nous discutons d'une théorie plus fonctionnaliste qui intègre les tentatives d'explication des effets d'apprentissage: la théorie de l'intégration de l'information [46]. Selon cette théorie, l'apprentissage provoque un «raffinement et la réorganisation des connexions entre les patterns de connexion des neurones dans régions appropriées du système thalamo-cortical". L'apprentissage détermine la façon dont l'information est intégrée dans un système (c’est-à-dire la qualité de la conscience). De nombreux éléments de cette théorie sont en accord avec la thèse de la plasticité radicale et nos résultats pourraient donc être pris en compte par cette théorie. Toutefois, cette théorie nie l'importance des rapports subjectifs, que nous considérons comme obligatoires afin de tirer des conclusions au sujet de la conscience phénoménale.

La théorie de l'espace de travail global [54,55] souligne également l'importance des mesures subjectives et est très similaire à la thèse de la plasticité radicale dans ses prédictions concernant les facteurs bottom-up. La théorie globale de l'espace de travail prédit que lorsque la force du stimulus bottom-up augmente, la probabilité que ce stimulus devienne conscient augmente. C'est exactement ce que nous avons observé dans les études 1 et 3.

Cependant, la théorie globale de l'espace de travail prévoit également que cette augmentation a lieu selon le principe du tout-ou-rien et donc qu'il existe une durée du stimulus cruciale au cours de laquelle les participants prennent conscience d'un stimulus. Dans notre première étude, nous avons observé des courbes sigmoïdes de conscience, ce qui indique que l'augmentation de la prise de conscience en fonction de la durée du stimulus n'est pas tout-ou-rien, mais pas linéaire non plus. En plus de cela, la distribution des réponses PAS dans l'étude 3 suggère que la conscience phénoménale avait des niveaux intermédiaires. Ainsi, nous soutenons que la conscience est un phénomène graduel, mais on pourrait également la considérer comme un processus qui évolue par étapes. En effet, la gradualité peut être à la base d'un traitement en plusieurs étapes, tout comme par analogie avec la physique, les changements progressifs de la température provoquent des différentes transitions d'état, par exemple lorsque l'eau se transforme en glace. Une idée liée a été proposé dans l'hypothèse de la prise de conscience partielle [256]: la conscience peut survenir à différents niveaux de la hiérarchie du traitement. Par exemple lorsque les lettres masquées sont présentées, les participants pourraient être pleinement conscients de petites parties de ces lettres, mais seulement partiellement conscients de la lettre dans son intégralité. Cette hypothèse propose donc l'idée selon laquelle la gradualité peut évoluer à partir d'événements discrets.

En outre, comme c'est le cas pour le cadre biologique, la théorie globale de l'espace de travail ne formule pas d’hypothèses concernant l’apprentissage. Une expérience récente sur les bébés de 5 mois pourrait même conduire à penser que cette espace de travail global est inné [353]. Cette expérience a démontré que le même réseau de neurones est activé dans le cerveau des bébés que dans le cerveau des adultes au cours de la perception visuelle consciente. Ceci est en contraste frappant avec notre prédiction que la conscience est acquise pendant l'enfance. Elle réside dans le débat inné vs. acquis et des recherches supplémentaires seront nécessaires pour établir ce qui est inné et dans quelle mesure nous apprenons à être conscients.

Une dernière théorie qui a été discutée est celle de « HOT theory » de la conscience [69,355]. Contrairement aux théories précédentes, cette dernière ne fait pas de prédiction par rapport au fait que des facteurs du stimulus bottom-up influencent la disponibilité à la conscience. Au lieu de cela, la disponibilité à la conscience ne dépend que de l'existence d'une pensée d'ordre supérieur lorsqu’on se trouve dans un état mental spécifique. Il ne nie pas l’éventualité d’influences bottom-up, mais ne précise pas comment elles pourraient influer sur l'existence des pensées d'ordre supérieur. De même, aucune hypothèse n’est faite concernant l'influence des facteurs top-down, comme l'attention et l'apprentissage. Récemment, des prédictions testables plus spécifiques et empiriques ont été formulées dans « HOT theory » [356]. L’apprentissage des pensées d'ordre supérieur pourrait être le résultat du développement du cortex préfrontal, qui est présumé être le domaine associé à ces représentations d'ordre supérieur. En outre, les pensées de second ordre peuvent être innées, alors que celles de troisième ordre (ou d'ordre supérieur) se développeraient pendant l'enfance. Cette hypothèse expliquerait comment la conscience peut être construite au cours du développement, mais ne prévoit pas expressément que ces processus d'apprentissage se produisent également chez les adultes à des échelles de temps plus restreintes. En revanche, la thèse de la plasticité radicale stipule explicitement que la conscience dépend de l'apprentissage, même chez les adultes. Une étude approfondie de la question serait nécessaire, afin de tester cette idée de manière spécifique. Cependant, à première vue, les effets d'apprentissage généraux dans notre cinquième étude indiquent que l'apprentissage (ou mieux: l’expertise) augmente la disponibilité de conscience.

En somme, la plupart des théories concernant la conscience prédisent que la force d’un stimulus bottom-up augmente la disponibilité à la conscience. Cependant, la plupart d'entre elles prédisent que la conscience est un processus de tout-ou-rien et que, à partir du moment où un stimulus est suffisamment fort, nous sommes pleinement conscients de ce stimulus. Au contraire, nous pensons que la conscience est graduelle et qu’il existe des états intermédiaires d'expérience phénoménale. En outre, la plupart de ces théories ne tiennent pas compte explicitement des effets top-down d'expertise. Nous soutenons que ces théories doivent être étendues afin de pouvoir faire des prédictions concernant la relation entre l'apprentissage et la conscience plus explicite. Ce faisant, d'autres expériences peuvent confirmer - ou infirmer - les mécanismes sous-jacents proposés.

De nombreux paradigmes expérimentaux développés ont contribué à la création de nombreuses théories vérifiables de la conscience. Cependant, nous pensons que des progrès passent inévitablement par des prévisions plus explicites. Une orientation future consisterait donc à une réflexion théorique profonde afin d’établir des théories plus directement comparables.

En outre, une attention particulière devrait être accordée à des questions de mesure, car le débat concernant la manière plus appropriée de mesurer la conscience reste ouvert. Comparer les différentes expériences n’est pas aisé, voire impossible, si différentes mesures dépendantes sont utilisées. Tant qu’il n’y a pas de consensus, nous sommes en faveur d’une approche à plusieurs volets dont les différentes mesures sont utilisées dans une expérience. Nous émettons également quelques réserves concernant les tests de conscience post-hoc, étant donné que la fatigue ou l'apprentissage pourraient influencer la conscience. Nous proposons d'utiliser un modèle mixte dans lequel les essais expérimentaux et les essais de test de conscience sont testés simultanément.

Enfin, en ce qui concerne la thèse de la plasticité radicale [7,93] qui a été testée lors des études conduites dans cette thèse de doctorat, nous reconnaissons que de futures recherches sont nécessaires afin de tester ses principales prédictions. Tout d'abord, nous pouvons appliquer les mêmes manipulations dans un paradigme de clignement attentionnel. Dans ce paradigme, la perception d'un stimulus est entravée non pas parce qu'elle est présentée pour une courte durée, mais parce que l'attention est captée par un stimulus présenté précédemment. Il serait intéressant de voir si l'apprentissage et l’expertise influencent également la perception de ces stimuli.

Deuxièmement, une étude longitudinale serait nécessaire afin de tester l'hypothèse selon laquelle nous apprenons à être conscient lors du développement. Bien qu'il soit difficile, voire impossible d'inférer la conscience phénoménale chez les bébés, nous pourrions commencer par examiner comment la conscience évolue au cours de la petite enfance, par exemple lors de l’apprentissage de la lecture.

Troisièmement, la phase d'automaticité proposée n'a pas été directement testée dans cette thèse de doctorat. Toutefois des prédictions fondamentales existent et pourraient être testées dans des recherches futures. La conscience est-elle réellement obligatoire lors du traitement automatique? Un moyen d’investiguer cette question consisterait à sonder la conscience des participants uniquement sur une petite quantité d'essais au cours d’un apprentissage. Cette méthode permettrait de voir s’ils étaient – ou non – phénoménalement conscients de la tâche automatique.

Dernier point, mais non le moindre, des méthodes neuro-imagerie pourraient certainement aider à tester les hypothèses de la thèse de la plasticité radicale. L'amélioration de ces techniques pourrait permettre de mieux décrire la qualité d'une représentation neuronale et de trouver les mécanismes neuronaux sous-jacents aux méta-représentations. Ces techniques pourraient éventuellement permettre de montrer comment le cerveau s'adapte et comment il pourrait apprendre quelque chose à propos de ses propres signaux.

English Summary

The main objective of this thesis is to explore the underlying mechanisms of the transition between conscious and unconscious visual processing. It is now widely accepted in the field of cognitive psychology that at least some processes can occur unconsciously. Visual perception is the most studied subject to this matter. Although we have the impression of a complete, detailed and continuous vision of the external world, it can be demonstrated that parts of this visual stream are not consciously perceived; for example because of the fact that they were presented very quickly, outside of the center of our visual focus or because of a lack of attention.

The major problem in the scientific study of (un)conscious perception is the fact that one has to rely on subjective measures. Indeed, only the seeing person is capable of reporting his visual experience and this report cannot be objectively verified by the experimenter. In other words, there is no directly measurable variable of the contents of perceptual experience which forces scientists to use data from a third-person perspective. Relying on introspective reports is difficult because of their qualitative nature and is unreliable because of their subjectivity. Therefore, in history, it was long considered as impossible to study consciousness scientifically. However, many developments in thinking and methodology have made room for the investigation of consciousness in experimental psychology.

Descartes [17] made a distinction between body and mind which enabled the scientific study of the brain, because it was considered as part of the body. However, (conscious) thought was part of the mind, a non-physical substrate that could not be studied scientifically. This was the main reason why, for a long time, consciousness was a subject restricted to philosophical thinking. It was only in the 19th century, that the first experimental psychologists argued that psychological processes could be measured and psychology became a scientific discipline. However, during the 20th century, behaviorists banned “consciousness” because only observable behavior was considered as providing valuable data and studying consciousness relied on unreliable introspective methods. However, later on, scientific developments radically changed this idea. For example, Gestaltpsychology showed in visual illusions that subjective awareness was a variable that could be manipulated. More importantly, Information Theory [20,21] created the metaphor of the human brain as an information processing system in analogy to a computer system. Experiments on “working memory” were very similar to what we now call consciousness studies. Furthermore, some experiments demonstrated unconscious processing (e.g. Marcel [3]) and Signal Detection Theory [26] provided a way of quantifying awareness reports. Finally, neuroimaging studies revealed that unconscious information processing is accompanied by observable brain processes and thus demonstrates that the underlying neural mechanisms of unconscious information processing in the brain can be compared to the mechanisms observed in conscious processing. This has thus far revealed many candidates for a Neural Correlate of Consciousness (the “NCC” [6,29]).

In sum, these recent developments have boosted experimental investigation as well as theoretical thinking on consciousness. Many theories of consciousness exist, some more philosophically inspired and others that are based on neural mechanisms. In the introduction of this thesis, we only discuss the theories that form the basis for the construction of our studies. We borrow the taxonomy of Block [34] to organize the multitude of theories and distinguish between a biological framework, a global workspace perspective and a higher order view.

In the biological framework, consciousness is defined by a biological state of the brain. For example, Lamme [38] states that recurrent processing in the brain is the defining feature of conscious processing. If processing is restricted to feedforward sweeps, it can influence further processing, but it is not considered to be conscious. If recurrent connections are involved in the processing stream, the percept is defined as a conscious percept. Even if this recurrent processing is very local (for example restricted to the visual cortex), participants are considered as being conscious of the material. According to Lamme [38], this definition of consciousness even applies when subjects thus deny subjective experiences. This is a very controversial theory, because it defines consciousness in function of a neural mechanism and disapproves the value of subjective reports.

On the contrary, emphasis and reinstated use of subjective reports is defended in the second sort of theory: the Global Workspace Theory (GWT). In this theory, consciousness is explained by the metaphor of a theater [54]. The theater “combines limited events taking place on stage with a vast audience, just as consciousness involves limited information that creates access to a vast number of unconscious sources of knowledge” [358]. Dehaene and colleagues [55,61,334] extended this idea and proposed that the neural signature of this workspace is a sudden ignition in widespread activation of parieto-frontal cortex. Furthermore, they distinguish four different levels of consciousness, based on two dimensions: bottom-up stimulus strength and top-down attention. If both dimensions are high, a stimulus is consciously processed. If only one of these dimensions is high, the stimulus is unconsciously processed (subliminally or preconsciously). If both dimensions are low, the stimuli have (almost) no effect on processing. Only in the case of conscious processing there is thus wide-spread activation to a parieto-frontal network, i.e. the workspace.

In a third, more philosophically inspired theory, Higher-Order Thought Theory [69,70], the intuition is followed that consciousness requires a thought to the effect that we are experiencing a certain stimulation. For example, when I say that I am consciously seeing red, I mean that I am thinking about me being in a state of experiencing redness. In general, according to this theory, conscious states are mental states we are conscious of. This theory thus particularly deals with the phenomenal aspect of consciousness (i.e. what it feels like to be in a conscious state).

The last two sorts of theories have substantially contributed to the construction of the radical plasticity thesis [7,93]. The radical plasticity thesis forms the starting point of the studies in the current doctoral thesis. It is therefore extensively described throughout the thesis.

The radical plasticity thesis [7,93] is a dynamic view on consciousness, stating that the brain continuously adapts itself through learning about its own internal signals by redescribing them. This redescription process corresponds to the formation of meta-representations from Higher-Order Thought Theory. Combining many such meta-representations increases the availability to awareness and corresponds to global broadcasting in Global Workspace Theory.

Furthermore, the radical plasticity thesis [7,93] states that the availability to awareness depends on the quality of a representation, which in turn depends on three dimensions: strength, distinctiveness and stability. Strong, stable and distinctive representations are more likely to be available for conscious processing. For example, increasing the duration of presentation of a stimulus (i.e. strength) increases the quality of the representation of that stimulus and therefore increases availability to awareness.

Finally, the relationship between quality of representation and availability to awareness is not a one-to-one relationship but evolves in three stages: the implicit cognition stage, the explicit cognition stage and the automaticity stage.

First, in the implicit cognition stage, there is a very vague phenomenal experience. Intentional control and access consciousness are low, implying that one cannot control the effect a stimulus has on behavior and one cannot verbalize the identity of the stimulus. This is the stage of unconscious processing. For example, in artificial grammar learning experiments [94], participants are confronted with strings that follow complicated rules. After this presentation stage, participants are able to indicate whether new strings obey these rules or not, which indicates that they successfully learned about the material. However, they cannot verbalize these rules. This suggests that they learned about the material in an unconscious, or at least in an implicit, manner. In a related paradigm, sequence learning [102], it was furthermore observed that participants could not withhold from using a difficult sequence that was learned during a sufficient amount of time. In other words, they could not control the acquired information and on top of that, they could not report upon it. The information was processed as demonstrated by faster reaction times when the material was presented according to the sequence than when it followed a different sequence. This again suggests that learning without awareness is possible. Conditioning research (e.g., [109,113,118]) also reveals such unconscious effects. Even when participants are not aware of an association between two stimuli or between a stimulus and a response, their behavior is influenced by the association. However, this research field is less contingent upon the obtained results and critics [129] question whether awareness was validly measured in these paradigms. A third, more profound literature concerns subliminal priming paradigms. In a subliminal priming paradigm, stimuli are presented for a very short duration and subsequently masked (i.e. the primes). This renders them invisible and they are thus not processed consciously. They are processed unconsciously, which is demonstrated by the effect they exert on responses to subsequent stimuli (i.e. the targets). Many such effects have now been observed, even up to the level of semantic influences [135,136,137]. For example, if the subliminally presented word “doctor” is followed by the semantically related word “nurse”, participants respond faster than when it is followed by the unrelated word “tree”. In sum, several paradigms have made room for the possibility that unconscious (or implicit) processing is possible. In these paradigms, unconscious processing is often compared to conscious (or explicit) processing, which is the second stage in our Quality of Representation framework.

In the second stage, representations have accrued sufficient quality to be available to conscious access. It is these contents we are conscious of, for example when doing a difficult multiplication. It mainly concerns attention-demanding tasks and the stage is characterized by flexible control. Because consciousness is usually considered as the default mode we find ourselves in, studies mostly describe this stage by contrasting it with the previous, unconscious stage [2]. Indeed, many differences were observed between conscious and unconscious processing. They indicate that consciousness is necessary for adaptive control [1], for taking context into account [176], for chaining serial mental operations [173], for inhibition [167], … On the contrary, other experiments demonstrate that some of these processes are not restricted to conscious processing. For example, subliminally presented no-go cues induced inhibition [181]. It is thus far not clear whether it can be stated that the function of consciousness is to offer flexible control and adaptive behavior. These inconsistencies lead us to assume that the flow between the stages is gradual. Therefore, we manipulate the independent variables in our studies gradually.

Finally, the third stage of automaticity is characterized by well-trained behavior, for example playing the piano in expert piano players. Research on expertise effects demonstrates that processing is indeed very different for experts than for novices. For example, performance for categorization on the sub-ordinate level (e.g. Bulldog, Schnauzer,…) is normally harder than categorization at a basic level (e.g., dog versus cat). In dog experts these categorization performances can reach the same level [191,192]. In our view, the function of expertise is that processes can become automatic. In the example, the dog expert can automatically categorize the different sorts of dogs. In the automaticity stage, representations are highly available for action, demonstrated by high performance. On the other hand, control is low, because of the ballistic character of these processes [224]. Once initiated, they cannot – or hardly- be stopped. Furthermore, these processes are only optionally available to phenomenal consciousness. Indeed, the function of these automatic processes is their efficiency. They do not require attention and attention can thus be focused elsewhere. Normally, these processes are thus not conscious as they progress, but focusing attention on these processes can make them available. For example, when driving a car, one is normally not conscious of the clutch movements made, but one could focus on them when required. Hence, automatic processes are not necessarily unconscious processes. Rather, awareness is optional.

The transition between the three stages that were described, has to be thought of as a gradual transition. Crucially, this transition depends on the quality of representation. In the studies in this doctoral thesis, we manipulated the quality of representation in order to explore the transition between the unconscious (implicit) stage and the conscious (explicit) stage. These manipulations were assumed to influence the quality of representation from two directions: bottom-up and top-down.

We defined bottom-up factors as factors proper to the external stimulation, while top-down factors are proper to the subjects’ brain. This is coherent with the definition of input and priors in the Bayesian inference framework [228,229]. The dimensions of the quality of representation (strength, stability and distinctiveness) can thus be manipulated by as well bottom-up factors as by top-down factors.

We present five studies in this thesis that investigate the influence of these bottom-up and top-down factors in a subliminal perception paradigm. Much research has focused on a particular bottom-up factor: stimulus strength. For example, Del Cul et al. [231], observed sigmoid increases in awareness as a function of the interval between a stimulus and its subsequent mask. However, the exact form of the curve is a matter of debate: some view it as an all-or-none phenomenon [60,231], while others view it as a continuum [7,233].

In Study 1, we explored the form of these curves by varying the prime duration in a subliminal priming paradigm. First, several priming blocks were presented to participants whereby prime duration increased in each block. During this task, participants had to categorize the targets and were not informed about the presence of primes. Next, we measured prime awareness by means of the same amount of blocks with the same increasing prime durations. This time, participants were informed about the presence of the primes and were asked to categorize them. This is a typical objective prime awareness test, based on the d prime (d’) measure from Signal Detection Theory [26]. This study allowed us to explore the dynamics of unconscious and conscious perception as a function of prime duration.

As expected, we observed an increase in priming effects and in awareness in function of prime duration. The curve forms were concave for priming effects and sigmoid for awareness. This indicates that the underlying mechanisms of priming and awareness are at least partly dissociable. Furthermore, the curves for priming effects significantly differed from zero at a smaller prime duration than the awareness curves. This confirms the existence of unconscious priming effects that were demonstrated in the literature [3,133,148]. However, we observed that these unconscious priming effects only occurred at crucial prime durations, indicating that these unconscious effects are hard to find if prime duration is not carefully manipulated. Finally, the awareness test indicated that awareness responses were influenced by the identity of the target, despite the instruction to ignore the target. This led us to investigate the validity of such objective awareness tests in Study 2.

In Study 2, we again used a subliminal priming paradigm and explored priming effects and awareness. However, this time the aim of the study was to investigate several factors that might influence the awareness measure, and as such might question its validity. Therefore, we presented several slightly different awareness tests to participants. We manipulated three factors. First, we investigated whether there was an influence of the presentation of the target on prime awareness. We either presented a directional target or a neutral target during the awareness test. We assumed that the directional target would hamper visibility of the primes in comparison with the presentation of a neutral target, because the directional target might interfere with the processing of the prime. As a second factor, we induced a delay between target and response. We assumed that this would increase awareness, because it takes time to become aware of a stimulus. As a third factor, we manipulated top-down attention. In one condition, attention could be fully allocated to the prime and in the other condition attention was divided between prime and target. We assumed that increased attention would lead to increased awareness of the primes.

All three assumptions were confirmed: a neutral target, focused attention and a delay between target and response all increased awareness. This implies that the standard d’ measure in consciousness research might be an over- or underestimation of real awareness. This is problematic, especially in the case of underestimation as unconscious effects on behavior might be attributed to minimal conscious processing. Therefore, we used a subjective measure of awareness in our subsequent studies. We chose to use a PAS-scale (Perceptual Awareness Scale) [246], which questions the phenomenal visibility of stimuli. Participants had to rate this visibility on a 4-point scale, including 1) no experience, 2) brief glimpse, 3) almost clear experience and 4) clear experience of the stimulus. However, other issues can be raised on subjective measures. First of all, the validity of subjective measures might suffer from the “underconfidence phenomenon” [160], i.e. the fact that participants tend to underestimate their awareness. Second, it is unclear how to demonstrate unconscious effects by using such measures, because it might be discussed whether for example “brief glimpse” responses indicate conscious or unconscious processing. Therefore, we did not replace the objective measure with the subjective measure, but we used both at the same time. Such a multi-pronged approach is, in our view, the best solution we have at the moment.

In Study 3, we reinstated the investigation of bottom-up factors on awareness. We now manipulated the number of repetitions of a masked stimulus in order to explore the effect of stimulus stability. We again assumed that increasing the stability of stimuli would increase the availability to awareness. This is in contrast with other studies by Marcel and by Wentura and Frings [3,262]. They observed that repeating a masked prime increased priming effects, but not awareness. However, we believed that improved methodology might shed new light on this. We tested priming and awareness in a mixed design, where participants had to categorize the target on half of the trials and had to perform an objective and subjective awareness test on the other half of the trials. Importantly, we observed that both priming and awareness increased as a function of stimulus stability. We interpret these results in the quality of representation framework and state that repeating a stimulus increases the quality of its representation and therefore has an increased likelihood of being consciously accessed. Furthermore, we failed to observe any unconscious priming effects in this study. Significant awareness results were observed for less repetitions of the prime than significant priming effects. Thus, priming effects were only found when participants were aware of the stimuli. This confirms our previous statement that unconscious effects are hard to find and depend on specifics of the task at hand. Finally, participants used all PAS-scale responses (although the “clear experience” responses were sparse). This suggests that experience of these stimuli was not all-or-none and thus supports our view of consciousness as being graded.

In Study 4, we investigated the top-down effect of expertise on awareness. The most important prediction of the radical plasticity thesis reads that consciousness depends on learning. Extended learning gives rise to expertise and therefore, it follows that expertise should increase awareness, at least when participants are probed to report upon this awareness. Consistent with our other studies, we used a subliminal perception paradigm, but now without priming. We compared Chinese and European participants in their recognition (objective awareness test) and reported visibility (subjective awareness test) of Chinese characters and Mayan symbols. We hypothesized that Chinese participants would have increased performance in recognition of and increased reported awareness for Chinese characters. This is exactly what we observed, which confirms the idea that expertise increases the availability to awareness for objects of expertise.

Study 5 is closely related to Study 4 and was constructed with the purpose of controlling the learning situation. Non-expert participants were trained on a certain stimulus set and recognition performance and reported awareness were compared before and after training. In three experiments, the intensity of learning was increased, because of a failure to observe any training effects. In the third experiment, a general training effect could be demonstrated after nine consecutive training days. However, the effect was not restricted to the trained stimuli, but generalized over the control stimuli as well. We observed this general effect only for recognition performance (objective awareness test). In contrast, subjective awareness reports showed a specific learning effect, with increased visibility restricted to the learned stimulus set. We assume that the latter is an artifact induced by the response alternatives that were presented during the preceding recognition test. This means that higher awareness was reported when the response alternatives were part of the learned stimulus set than when the response alternatives were part of the non-learned set. In sum, the experiments in Study 5 demonstrated that learning has to be sufficiently extended in order to induce effects on awareness. Perhaps only real expertise, and not just simple associative learning, influences the availability to awareness.

In sum, the bottom-up manipulations demonstrated clear effects on the availability of awareness, while the top-down manipulations of learning and expertise were less clear. It might be the case that the degree of learning that is necessary to increase the availability to awareness coincides with the degree of learning that is necessary for expertise effects to occur.

In the general discussion, we frame these results not only in the radical plasticity thesis, but also in other existing theories of consciousness. We redescribe the three sorts of theories that were proposed by Block [34] and highlight how our studies fit into the predictions made by these theories.

In the biological framework, and more particularly in Lamme’s theory [38], the bottom-up factors that we manipulated are assumed to influence the probability of the occurrence of recurrent processing in the brain. In this sense, our results do not falsify this theory. However, recurrent processing is supposed to be all-or-none, while we observed graded awareness reports. It is also unclear how expertise might influence the occurrence of recurrent connections. Is expertise an enabling factor, similar to attention? Or does learning contribute to the formation of these connections? No specific assumptions on learning effects have thus far been made in this theory or in other theories that share the ideas of the biological framework.

Next, we discuss a more functionalist theory that incorporates attempts to explain learning effects: the Information Integration Theory [46]. According to this theory, learning causes a “refinement and rearranging of connection patterns among neurons in appropriate parts of the thalamocortical system”. Learning determines the way information is integrated in a system (i.e. the quality of consciousness). Many elements in this account are in line with the radical plasticity thesis and our results might thus be accounted for by this theory as well. However, the account denies the importance of subjective reports, which we consider as mandatory when drawing conclusions about phenomenal awareness.

The Global Workspace Theory [54,55] also stresses the importance of subjective measures and is very similar to the radical plasticity thesis in its predictions concerning bottom-up factors. The Global Workspace Theory firmly predicts that bottom-up stimulus strength increases the likelihood that a stimulus will be consciously accessed. This was exactly what we observed in Studies 1 and 3.

However, the Global Workspace Theory also predicts that this increase is all-or-none and thus that there exists a crucial stimulus duration at which participants become aware of a stimulus. In our first study, we observed sigmoid curves for awareness, indicating that the increase in awareness as a function of stimulus duration is not all-or-none, but not linear either. On top of that, the spread of PAS responses in Study 3 suggests that phenomenal awareness had intermediate levels. Thus, we argue that awareness is a graded phenomenon, although it may also be viewed as a stage-like process. Indeed, gradedness can be at the basis of processing in stages, just like, in analogy with physics, gradual changes in temperature cause different state transitions for example when water turns into ice. A related idea was proposed in the partial awareness hypothesis [256]: consciousness can arise at different levels of the processing hierarchy. For example when masked letters are presented, participants might be fully aware of small parts of these letters, but only partially aware of the complete letter. This hypothesis thus particularly deals with the idea that gradedness can evolve from discrete events.

Furthermore