Article de presse ou de vulgarisation
Résumé : Dans notre trimestriel d’été, Jean- Louis Siroux et Daniel Zamora analysent les discours qui légitiment les nouvelles politiques de lutte contre la pauvreté.Il fut un temps pas si lointain où l’on parlait volontiers de préserver la solidarité et de combattre les inégalités. Aujourd’hui, les politiques de lutte contre la pauvreté se penchent sur les « pauvres » eux-mêmes. Les politiques sociales deviennent cliniques, s’inscrivant dans le curatif, parfois même le palliatif. Elles travaillent au chevet du malade, tournant le dos aux causes de l’épidémie. Elles en viennent à nier la tension pourtant historique entre inégalité et pauvreté. « Or, de l’un à l’autre, bien plus qu’une variation lexicale, c’est tout un imaginaire politique qui se reconfigure », expliquent les auteurs de cette contribution. Un imaginaire qui, avec ses velléités déjà éculées de « mixité sociale », de « respect des pauvres » et d’« égalité des chances », se concentre sur les effets d’un système toujours plus inégalitaire plutôt que sur les causes structurelles de la pauvreté. Comment en est-on arrivé à un tel degré de confusion, de fantasme, de déni, qui nous amène à dissocier l’enjeu de la lutte contre la pauvreté de celui de la juste redistribution des richesses ? Et, in fine, quelle est la place du « pauvre », toujours plus responsable de sa biographie, toujours plus à l’écart des logiques de solidarité collective, dans un système où désormais la lutte contre la pauvreté se déploie en marge des politiques économiques et sociales ?La conclusion des deux chercheurs est sévère : certains dispositifs récents de lutte contre la pauvreté accentuent les inégalités, isolant toujours plus les publics discriminés par une mauvaise répartition des richesses. Un constat qui, tel un cruel miroir, nous questionne sur le rôle que nous jouons en tant qu’organisations de la société civile et parties prenantes à ces mêmes dispositifs.