par Delcomminette, Sylvain
Référence Philosophie antique, 13, page (147-169)
Publication Publié, 2013
Article révisé par les pairs
Résumé : Cet article se propose d’étudier les procédés platoniciens de l’exemple, de l’analogie et du paradigme, en insistant à la fois sur leur distinction et sur leur articulation mutuelle. En ce qui concerne l’exemple, il convient d’en distinguer un usage dianoétique, que Platon proscrit, d’un usage proprement dialectique, qu’il encourage et qui peut avoir deux fonctions différentes : faire comprendre une question ou une méthode et faire saisir une structure. L’analogie au sens strict développe cette deuxième fonction, en la complexifiant parfois (notamment dans le Gorgias et la République) par une dimension « constructive ». Reste que le but de l’analogie, comme celui de l’exemple, est avant tout de faire saisir des rapports ; et dans la mesure où ces rapports sont purement intelligibles, l’analogie peut elle aussi être considérée comme un procédé dialectique. Enfin, le paradigme tel qu’il est utilisé dans le Sophiste et le Politique développe les traits précédents au sein d’un dispositif très élaboré, qui a pour but essentiel de faire saisir une méthode susceptible d’être appliquée à ce qui fait l’objet de l’examen. En ce sens, il s’agit d’un prolongement de l’un des usages dialectiques des exemples que l’on trouve dès les premiers Dialogues. La pensée paradigmatique de Platon manifeste ainsi une grande continuité, qui repose sur une conception fondamentale : la dialectique, en tant que science suprême qui étudie les Idées, ne peut être décrite de l’extérieur, mais seulement se pratiquer. Cette pratique se prépare, non pas en commençant par se tourner vers le sensible, comme on l’écrit parfois, mais en se tournant vers des cas tout aussi intelligibles – en tant que rapports ou ensembles de rapports, c’est-à-dire structures –, quoique « plus faciles », afin de rendre le dialecticien ultimement capable d’examiner n’importe quel sujet.