par Feyereisen, Justine
Référence Les Cahiers J.-M. G. Le Clézio, 5, page (85-96)
Publication Publié, 2012
Article révisé par les pairs
Résumé : L’un des premiers écrivains à remarquer Le Procès-Verbal (1963) de J.M.G. Le Clézio n’est autre que son compatriote Malcolm de Chazal (1902-1981), qui y a reconnu l’habileté d’un jeune auteur à mettre en scène les sens de son protagoniste pour entrer en étroite communion avec la nature, rapprochant ce roman de sa propre production. Un tel hommage n’est pas resté sans réponse puisque Le Clézio évoque son admiration pour le génie de Floréal, l’« un des poètes les plus féconds et les plus authentiques de la littérature française contemporaine » pourtant méconnu du grand public, dès qu’il en a l’opportunité, saluant « [sa] profonde authenticité, son éthique, et la surprenante puissance de sa création ». Outre les éloges qu’ils se sont adressés, des liens se sont imperceptiblement noués entre leurs textes autour d’un imaginaire propre à l’archipel des Mascareignes, un dialogue qui n’a pas échappé au journaliste B. Violet : « ne peut-on pas considérer l’auteur du Procès-Verbal comme le fils spirituel de Malcolm ? Sûrement, dans la façon dont ces deux authentiques créateurs appréhendent le monde. Et plus particulièrement les îles considérées comme des creusets de civilisation. » Afin d’approfondir la question soulevée par celui que le poète présentait comme « le dromadaire des déserts malcolmiens », nous aimerions examiner la filiation intertextuelle à travers les intentions manifestées par les auteurs au niveau du paratexte , avant de nous tourner vers le texte en relevant les thèmes abordés, ce qui nous amènera à explorer tant Sens-Plastique, La Vie filtrée et Petrusmok de Chazal que les récits lecléziens d’inspiration mauricienne . Parallèlement, nous aborderons l’organisation textuelle des aphorismes chazaliens comme révélatrice d’une plume tant analogique qu’anaphorique calquée sur le modèle des sirandanes, à l’aide des outils que nous prêtent la stylistique et la théorie de l’évocation . L’objectif de notre analyse sera d’illustrer la manière dont ces deux descendants de colons d’origine française établis à Maurice au XVIIIe siècle s’inspirent des traditions orales créoles, une démarche susceptible de lever un coin du voile sur la relation d’interdépendance entre la langue et la littérature.